Alison avait écouté patiemment tout ce que venait de déballer son interlocutrice, sa main reposant toujours fermement sur son sabre-laser, les jointures de ses doigts prêtes à craquer. Puis la dernière phrase fut une réelle libération, un simple répit certes, mais une bulle d’oxygène bienvenue. La Jedi-Noire laissa son bras retomber mollement le long de son corps, les yeux rivés sur son arme fétiche trônant toujours sur le bureau. Elle prit quelques secondes de réflexion avant de décliner le verre, son destin n’était pas encore fixé et elle préférait poursuivre avec les idées claires.
Je vais … tout vous raconter sans rien omettre. Je suis donc bien une citoyenne impériale, née sur Dantooïne il y a trente-deux ans. Vers mes six ans, un étrange visiteur s’est présenté chez nous : ce n’était rien de moins qu’un Jedi. Il n’a pas mentionné son identité mais a remarqué mon potentiel dans la Force, il m’a enlevée pour me former. J’ai vécu à ses côtés tout en profitant de son enseignement précieux jusqu’à mes vingt-et-un ans. Ce fut une période rude mais enrichissante et je lui dois beaucoup. Seulement … elle releva la tête et souria tristement en se remémorant sa fugue. Seulement un jour ou l’autre les énigmes ne suffisent plus, et l’on a besoin de réponses, j’ai voulu comprendre et la vérité ne m’a pas satisfaite. J’ai donc fugué, je voulais revoir ma famille mais hélas … Son visage s'assombrit, sa mâchoire se crispa et elle secoua la tête lentement. Je suis arrivée trop tard … ils avaient étés tués. J’ai traqué les responsables … Ses poings se serrèrent et son regard s’embrasa. Je les ai détruits, prolongeant leur agonie et m’en délectant, sourde à la pitié et sur l’instant j’ai adoré ça. C’était une sensation chaude et réconfortante, quelque chose de nouveau que mon enseignement Jedi avait pour but de faire taire. Je ne pouvais plus faire marche arrière, j’avais peur de rejoindre mon maître et j’étais effondrée … j’ai ainsi sombrée dans les vices et l’alcool, la débauche, et ce durant de long mois. J’ai usée de la Force à des fins égoïstes et sans précautions, ne répondant qu’à mes pulsions. Ce comportement attira un sinistre personnage à me trouver : un Sith, mon maître Sith. Ce dernier me montra l’univers comme un champ de possibilités infini, c' était tout simplement la vérité que j’attendais. Elle parlait presque avec un soupçon de nostalgie. Après toutes ces années de privations à vouloir sauver les faibles, je n’avais même pas pu sauver mes parents … j’ai haïe le code Jedi pour cela, et j’ai embrassé la voie sombre de mon nouveau maître sans hésitation. Jusqu’à mes vingt-huit ans j’ai profité de ses connaissances, puis lors d’un pillage il trépassa non sans me donner un dernier conseil : je devais briser mes chaînes une fois pour toute … je devais tuer mon premier maître. J’ai emporté son collier en souvenir et je me suis exécutée … Sa voix devient moins sûre, chevrottante. Mon premier maître, celui qui fut un père pour moi, a jeté son arme à terre sans combattre car il refusait de me faire du mal malgré ma chute. Je l’ai tué.
La jeune femme venait de se confier pour la première fois sur sa vie, vivant depuis toujours sous couverture. Un lourd fardeau quitta ses épaules et des larmes roulèrent sur ses joues, elle souriait doucement.
J’étais libérée, sans maîtres j’étais moi même devenue la maîtresse de mon destin, et ce forte d’une addition de deux enseignements puissants. J’ai décidé de rebâtir le domaine de ma famille sur Dantooïne et m’engager dans quelque chose d’enfin utile. J’ai parcouru une bonne partie de la Galaxie et c’est bien l’Empire qui me semblait être l’institution la plus apte à établir une civilisation forte et pérenne. J’ai commencé à gagner beaucoup d'argent. Je me suis entouré d’une nouvelle famille, tout en conduisant mon entreprise à un sommet rarement égalé sur Dantooïne … et la Force n’est pas étrangère à ma réussite. Une fois bien établie, j’ai accéléré le rythme en entrant au service de l’Empire en tant que Maire de ma ville natale. Dernièrement j’ai appris que mon maître Sith était encore en vie, son esprit sommeillant dans son collier que j’avais emporté. A travers ce dernier il a lancé un appel dans la Force en direction de son premier apprenti, je ne le connaissais pas et notre ancien maître désirait voir lequel de nous deux triompherait pour s’emparer de l’enveloppe du vainqueur. J’ai triomphé, mais avant de porter le coup fatal sur mon rival … j’ai détruit le collier afin de respecter ma promesse : je devais briser mes chaînes. J’ai fait preuve de compassion et mon adversaire de l’instant est devenue mon disciple, je ne suis donc pas seule. Voilà qui je suis … une patronne, une fonctionnaire, une patriote, une Jedi-Noire. Je suis Alison Malora.