- ven. 3 janv. 2020 14:14
#36759
L’escorte arkanienne se sépara de la flotte impériale, allégée d’un passager. Dès le premier saut amorcé, l’Impératrice s’isola dans sa cabine, bien moins spacieuse que celle qu’elle venait de quitter, et vide. Assise face à la console, installée sur ce long mur blanc, à l’opposé de la couchette, Elysia lisait à rythme lent les lettres maladroitement tracées par son frère à l’encre synthétique. Le point final la laissa indifférente, pas un soupir, pas un haussement de sourcil. Deux index et deux pouces se saisirent du texte, deux pinces qui tirèrent chacune d’un côté pour déchirer le filmsi. L’opération se répéta pour les deux morceaux ainsi séparés. Les quatre pans griffonnés furent rangés.
L’Arkanienne releva la tête.
- « Communication. Adasca. »
La console réagit aussitôt pour établir la connexion. Elena apparut face à la Monarque.
- « Votre Majesté … Impériale.
- Dame Adasca. Mon retour est imminent. Préparez le Dominion au départ de la Flotte d’Olim pour Yaka. »
L’interlocutrice hocha la tête. La conversation s’arrêta là. La communication fut coupée.
- « Communication. »
La console se tenait prête.
- « Naghin’Ter. »
- « On dit, Monsieur, que la journée sera particulièrement douce pour la saison. Fais-je préparer votre speeder ? »
L’homme ne répondit tout d’abord rien. Il posa son verre, d’un geste incertain. Longtemps, il observa son majordome. Et finit par donner un signe positif de la main, pouce levé. Hecton quitta la pièce, en quête d’un laquet à qui confier la mission qu’il s’était lui-même attribuée.
- « Ah ! Patia ! »
Mais elle ne le laissa pas parler.
- « Monsieur, le poste sonne depuis tout à l’heure ! »
Il ouvrit de grands yeux.
- « Je vais chercher sa Seigneurie … »
Il fit demi-tour à petits pas pressés, les traits tirés d’angoisse. Il se présenta à nouveau devant son maître.
- « C’est prêt ?
- Hum … Pas tout à fait. Vous avez une communication entrante.
- Et alors ?
- D’Elizabeth Civicius.
- Ha ha ! »
Il se leva d’un bond, tituba, déambula jusqu’à son bureau. La solitude faisait des ravages. La dernière distraction digne de ce nom avait été la mort de ce brave Varan, pourtant largement encouragé par une milice violente et loyale. Quel gâchis. Le compte principal des dépenses de la maison tenait désormais en une ligne : alcool. Local, exclusivement. Parfois républicain. Des vins. Spiritueux. L’Arkanien s’assit à son bureau, chassa ses serviteurs. Dans le reflet de l’écran éteint, il se mira un instant. Quel coup de vieux. Il rangea derrière son oreille une mèche de cheveux inégale. Lui-même ne se rendait pas compte des changements qu’avait subi son visage. Une fois faite sa toilette, il appuya brusquement sur le bouton qui déclencha la communication, et de ses deux mains, agrippa les accoudoirs de son fauteuil.
L’Impératrice allait abandonner quand enfin l’écran changea de couleur. Son interlocuteur apparut. Elle ne le reconnut tout d’abord pas. Il avait changé. Il s’était mué, en quelques années à peine, en un homme déjà vieux, déjà fatigué. Il semblait avoir bu.
- « Elysia Civicius, bonjour.
- Astellan.
- Pardon ! »
Il sourit. Ce sourire qui n’avait, lui, pas changé, moqueur.
- « Que me vaut cet honneur ? »