- mar. 15 févr. 2022 21:31
#40305
Et arrivant sans un bruit
Elle inquiète le sage
Et plonge l'aventurier dans le néant
Qui est-elle ?
Tout avait commencé avec la mort de Priar. Tout avait commencé avec le mensonge de Iro. Ryloth. Et une foule de souvenirs. Souvenirs mués en haine pure. Mya. Marak. Et quatre ans plus tard …
Une mise au point ? Le mot était bien faible. Une vengeance.
Tedrem, Malastare
La grille de la cour boueuse de l’Aérolithe était close, comme toujours à cette heure tardive de la nuit. La Sith, d’un bond léger, attrapa le haut de la grille, s’y hissa, et franchit la barrière d’acier. Balayant l’endroit d’un regard, elle constata que les carcasses métalliques avaient été enlevées. Quelque chose bougea dans le fond de la cour, près du mur. Ce quelque chose était un quelqu’un, qui se redressa en apercevant la silhouette encapuchonnée qui s’approchait de lui.
- « T’es qui ?! C’est fermé, t’as pas vu ?! »
Le type dégaina un blaster bas de gamme, mais l’intruse était déjà à portée de poings et lui asséna un violent coup de coude qui le laissa pour assommé. La Mirialan, sous sa capuche, esquissa un sourire moqueur. La porte ayant été dégagée, elle se donna la peine d’entrer, interrompant une partie de cartes alcolisée.
- « Hé, machin, tu … Mais t’es pas machin ! »
Barmo se leva d’une traite. Il revivait une scène d’horreur, quatre ans plus tard. Sans mot dire, la Sith saisit de ses deux mains - l’une gantée, l’autre de jade - les bords de la capuche et la rabattit en arrière. Ce qui frappa tout d’abord les trois hommes fut la grande balafre noire d’encre qui ravageait un visage qu’on imaginait autrefois joli. La seconde chose qui marqua le trio fut le regard disymétrique qui brillait dans la pénombre du garage désordonné. L’impressionnante chevelure tressée, qui prenait racine sur le crâne et s’élevait en un chignon structuré, avait été reléguée au rang de détail insignifiant. La Dame Sombre n’eut aucun besoin d’analyser son environnement direct. Elle connaissait maintenant parfaitement le hangar qui servait de garage à l'écurie de course qu’elle avait financée. Le plafond était haut d’au moins six mètres. Sur la droite, il y avait une large porte métallique, avec le pont de levage pour les pods. Sur la gauche, s’étendaient des étagères qui avaient été rangées depuis. Les deux tables mal éclairées perduraient, en revanche. Ce soir, ils n’étaient que trois.
- « Je viens voir Kehera. »
Pas un rire. Pas un mot. Barmo, seul face à l’inévitable.
- « Tu lui veux quoi ? »
La Mirialan prit une courte inspiration.
- « Je suis Liuhin Jama. Iro et moi avons un différend à régler. »
Le pilote écarquilla de grands yeux.
- « Jama ? Tu …
- Où est Iro ? »
Barmo leva les mains en signe d’apaisement, voyant l’air menaçant de la Mirialan.
- « Je ne pense pas qu’il soit en état de te voir … dans cet état. »
La Sith avança d’un pas.
- « Attends ! »
Barmo, les mains toujours devant.
- « Il … »
Il joignit les mains sous son menton.
- « Non … vraiment … ça va lui faire un choc. »
Le poing pourpre, dans son gant de kevlar, se ferma brusquement. D’un geste ferme et contrôlé sur le côté, la Jen’Ari envoya valser le pilote à l’autre bout de la pièce. Les deux autres n’osèrent pas bouger, toujours cartes en mains, mais bouches bées. L’intruse gravit rapidement les marches qui menaient au bureau. Elle sentait la présence de Iro en ces murs, elle le savait ici, et baigné d’une aura particulièrement négative. Elle s’arrêta un instant devant la porte, puis la poussa doucement pour découvrir un contrebandier assis dans un fauteuil de bois, à demi étalé sur son bureau, tenant encore une bouteille à la main. La Mirialan s’approcha et s’accroupit à côté de lui. Il empestait l’alcool.
- « Iro ? »
Elle dut l’appeler une seconde fois pour qu’il ouvrît enfin un œil. Il la reconnut tout de suite, malgré les cicatrices.
- « Jama ? »
Elle lui sourit gentiment. Et le sourire devint une grimace cruelle. Tout en se relevant, la Sith saisit Iro à la gorge. Sa chaise bascula en arrière et elle le plaqua fermement contre le mur.
- « Tu as menti. Tu m’as menti … »
La bouteille, lâchée, se brisa sur le plancher.
- « Liuhin … je … je comprends pas … »
La main gantée resserra sa prise.
- « Je t’ai aidé. J’ai travaillé pour toi. Je t’ai permis de regagner la faveur de Uchai. Et toi, tu m’as menti. »
Le ton était sifflant. La Sith articulait chacun de ses mots afin qu’ils soient bien compris de leur destinataire. Mais il avait à se défendre, bien que peinant à respirer.
- « Tu n’as pas fini ton travail … et c’était la seule façon de m’en sortir … je pensais … je … »
Il réalisa soudain quelque chose.
- « … Ce n’était pas toi ? … Qui … ? »
Il désaoula soudainement. Ses sourcils durement froncés exprimaient toute l’incompréhension à laquelle il faisait face.
- « … Il a dit … une femme … Je pensais que …
- Tu pensais t’être enfin débarrassé de moi.
- Non, non, non ! Je pensais que tu serais assez forte pour t’en sortir et … et … »
La prise se resserra encore sur sa gorge.
- « Tu as vu Uchai.
- Oui …
- À quoi ressemble t-il vraiment ?
- C’est … un homme … avec …
- Tu ne peux pas me mentir … »
La main d’émeraude, avec prestance et aisance, frappa brutalement le front du contrebandier et planta ses ongles dans la chair de son visage. Iro n’eut pas le loisir de pouvoir réagir. Son esprit se trouva aussitôt envahi d’une pensée étrangère, et agressive. Une furie. La violence de l’impact mental lui ôta connaissance et fit tomber ses défenses. La Jen’Ari passa en revue tous les souvenirs récents de l’Humain. Elle broya les détails stupides et inutiles pour ne garder que les bribes d’intérêt. Et enfin, enfin … Uchai. Sa silhouette. Son visage. Lui. La Sith lâcha sa victime. Iro s’écroula au sol.
- « Jama ? Iro !! »
Barmo se précipita au côté de son ami. Son regard fit des allers et retours rapides entre les deux antagonistes.
- « T’as fait quoi ?! »
Les yeux de la Mirialan se plissèrent doucement. Le regard vairon devint inconfortable pour le pilote.
- « Il …
- Il ira bien. »
Une brève inspiration.
- « Barmo ? »
Il releva la tête vers elle.
- « Où est Marrimlioè ?
- Quoi ?
- Iro t’as parlé de cet endroit.
- C’est … sur Roon ! Mais … tu devrais plutôt parler de tout ça à Gado … Haarm Gado.
- Le lieutenant ? »
Barmo acquiesça timidement.
- « Pourquoi m’aiderait-il ?
- Il a … quitté le service de Uchai. »
Elle marqua une courte pause.
- « Barmo.
- Oui ?
- Je pense que Iro n’est plus en état de gérer l’écurie. Tu vas, toi, gérer mes affaires ici. Veux-tu ?
- Oui. Mais …
- Tu me dois la vie ! Ne l’oublie pas !
- Oui … »
Vide spatial
Cela faisait des années que ça n’était pas arrivé. Elle était assise par terre, les coudes posés sur ses genoux, le visage enfoui entre ses mains, et elle pleurait. Et les larmes salées brûlaient ce qui restait de peau intacte, brûlaient ses lèvres. Derrière ses paupières closes, elle distinguait la maison en feu, un feu surnaturel, fait de flammes écarlates. Elle revoyait les deux assassins. Elle revoyait le Rat. Ce soir-là, Isabo avait été triplement sauvée. Mise en danger par sa faute, sauvée de sa main. Elle était le seul élément constant de son triste entourage. Elle avait été un refuge, sa Gardienne. Elle était de nouveau en danger, malgré toute la distance qu’elles avaient mise entre elles. La peine serra le cœur de la Sith. La peine se mua en colère, et la colère en rage. Ses deux poings se crispèrent contre ses joues et elle laissa échapper un râle de haine. Elle, toute puissante, ne pouvait rien faire. Le pied à peine posé sur Roon, Isabo mourrait. C’était un piège grossier, mais efficace. Et la colère … jamais cette colère ne la porterait jusqu’au bout de cette mission. C’était trop risqué. Si elle perdait Isabo … elle aurait enfin, et définitivement, tout perdu.
Il passa une heure, peut-être deux. La Sith attira finalement à elle la commande déportée de la radio du vaisseau. Elle pianota sur le petit clavier du comlink qui ornait habituellement son poignet, jusqu’à trouver la fréquence dont elle avait besoin. L’instrument de communication de l’Odonata émit un grésillement.
- « Sareth ? »
Cette voix si particulière, le Mandalorien ne l’avait certainement pas oubliée.
- « J’ai besoin de toi … »
Cette voix empreinte de colère et de tristesse … La voix de Ranath.