- mar. 7 août 2018 08:16
#33491
Balmorra. Pourquoi revenir sur Balmorra. Cela n’avait été qu’une escale. Un imprévu. Un petit détour. Après les révélations de la louve, Ranath s’était juré de ne jamais revenir ici. Culpabilité ? Pas une once. Toute cette histoire n’avait rien à voir avec elle. L’autre s’était laissée avoir. Momentanément, elle était devenue faible et vulnérable. Ou bien l’avait-elle toujours été. Sa punition était la meilleure des leçons. Comme l’était celle de Sabina, pensa aussitôt la Sith. Un froncement de nez.
Ne baisse jamais ta garde.
Alors elle était revenue. Ici. Là où la tombe lui était apparue pour la première fois. La tombe d’un enfant. Les affres obscures de Ziost lui avaient révélé l’identité de l’enfant. Mya, croyait-elle. La pierre, pourtant, était celle de Lina. Longtemps Ranath avait envisagé de retourner sur Mirial, pour, de ses ongles, gratter et creuser jusqu’au cercueil. Profaner la tombe de sa sœur.
La Force me guide.
Ici, sur Balmorra, il y avait ce fantôme. Il avait accompagné la vision de ses pas. Peut-être l’avait-il déclenchée. Pas un être de Force. Un individu, bien réel. Une présence. Comme sur Taris. Non, c’était différent.
Était-ce déjà la nuit ? Ou encore un peu le jour ? Sous les nuages chargés d’une pluie crasseuse, chaque ruelle était plongée dans l’obscurité. Ranath avait abandonné la traque. Il n’était plus là. Il n’y avait rien sur Balmorra. Recroquevillée sur le rebord de la fenêtre d’un entrepôt désaffecté, la Sith réfléchissait.
Tu as peur ?
Constamment
Constamment
Une voix dans la rue attira son attention. Un murmure rauque. Puis une note légère. Le regard d’or glissa jusqu’en bas. Ils étaient deux. Un homme et une femme. Un Devaronien et une Farghule. L’un avait les mains baladeuse, et l’autre gloussait. Loin d’un ronronnement de bonheur, la jeune femme se laissait aller à des grognements provocateurs. Lui s’avoua vaincu.
- « C’est encore loin ta piaule ?
Juste là. Allez, tu ne le regretteras pas.
Je peux plus attendre. On le fait là.
Là ? Dehors ?
Allez, y a personne. »
Elle s’écarta. Le silence calma un instant les ardeurs de l’impatient qui formula une nouvelle proposition.
- « Là-dedans alors. Ils l’utilisent plus depuis des années. »
Toujours pas de réponse.
- « T’auras un supplément.
O.K. »
La Farghule revint au contact, sa main disparut entre eux. Ils passèrent ensemble la porte métallique qui grinça et se referma. La Mirialan, du haut de son perchoir, laissa échapper un soupir las.
Je me casse.
Elle allait quitter son coin, se hisser sur le toit et disparaître. Mais l’arrivée d’un speeder dans la rue coupa son élan. Moteur éteint, deux silhouettes descendirent. Quelques mots échangés, une claque sur les fesses. Elle s’éloigna, remontant la rue vers un petit immeuble. Lui s’adossa au véhicule et alluma une cigarette. La pluie se mit à tomber. Dans l’entrepôt, l’affaire du Devaronien était conclue. À l’abri des regards, il paya, ajoutant comme promis un supplément conséquent. D’un pas qu’il crut discret, il quitta l’endroit. La porte grinça et se referma. Il descendit la ruelle, et prit le chemin de la maison.
Il fallut de longues minutes à la Farghule pour se refaire une beauté et sortir à son tour. En face, l’autre jeta sa cigarette et traversa la chaussée.
- « Narella. »
Comme surprise, elle releva la tête et se figea.
- « Donne. »
Il tendit la main. À contrecœur elle lui donna sa paie. Il compta.
- « C’est tout ce qu’il t’a filé ? Tu te fous de moi. Tu te fais sauter là-dedans et tu prends rien ? Donne. »
Deuxième échange. Un regard noir contre une poignée de crédits.
- « C’est pas beau de mentir. »
Il rangea l’argent et lui décrocha un sourire carnassier. Brusquement, sa main calleuse saisit l’épaule de la Farghule. Il la plaqua contre le mur de béton, posant son autre main sur sa bouche.
- « C’est mon tour. »
Elle le repoussa d’un geste, feulant avec agressivité. La réprimande fut d’autant plus violente. L’homme n’hésita pas à se servir de la crosse de son blaster pour calmer la véhémence de sa victime. Elle tomba. Il la releva. Et maintenant qu’elle était sonnée, il allait pouvoir finir sa journée sur une note positive.
Darth Ranath avait dégainé l’une de ses dagues sans y songer. Elle jouait avec la lame tandis que sous ses yeux, se tramait l’horreur. Ses réflexions étaient cyniques, si bien qu’elle avait un instant imaginé passer son chemin. Mais la peur l’avait retenue. Pas sa peur. La peur de la Farghule. Jusque-là accroupie sur le large rebord en béton de la fenêtre, la Sith se laissa tomber. Les huit mètres qui la séparaient de sa cible ne représentaient qu’un ridicule sursis. Un battement de cils, à peine.
En fin de chute, la lame perfora le crâne de l’importun avec un craquement sec. Elle s’enfonça dans l’organe cérébral, réduisant en bouillie sanguinolente son maigre contenu. Des oreilles, des yeux, du nez et de la bouche gicla du sang vicié. La réception du saut entraîna l’homme, déjà mort, au sol. Sa colonne vertébrale céda au niveau de la nuque.
En se redressant, la Sith retira sa dague du crâne du cadavre. La tête suivit d’abord le mouvement, puis retenue par tout un corps inert, laissa échapper la lame et retomba au sol. Narella, acculée contre le mur, ne pouvait détacher son regard du pantin désarticulé qui gisait sur le trottoir et si vidait de son sang dans le caniveau.
La Mirialan, en quelques mouvements rapides, détroussa le cadavre de ses crédits et essuya sa lame sur son pantalon. En tendit à la Farghule les quelques poignées accumulées dans la journée par son bourreau.
- « Casse-toi. »
Mais le regard de Narella s’était posé sur Ranath, et elle n’avait pas l’intention de bouger d’ici.