Il paru satisfait.
Bien. On vous a affrété un speeder de la police. Le cas est assez étrange selon eux. Quelque chose qui ne se résoudra pas par n'importe qui, de ce que j'ai entendu dire. Enfin, ils n'ont pas été très loquaces. Je ne suis que Ranger, donc bon...
Un peu de déception. Simple Ranger. Indigne de recevoir tout l'historique. La salive policière s'économise. On ne va pas faire un tableau à chaque curieux. Résumer aux inspecteurs est déjà une épreuve en soit. Jedi à sa suite, on prend la direction des places extérieures pour les visiteurs. Parking aérien de faible fréquentation. On ne fréquente pas assidûment les Jedi. On préfère les savoir près de nous en cas de guerre, de rébellion, d'assaut militaire. Mais on les aime loin quand on est en paix.
Un soubresaut mental parvient à Yselia. Comme un flash qui lui traverse la cervelle, d'un coup, paf !
Bien compris, bonne chance, en somme. Sobre et efficace. Ysela Merevis s'en allait en mission. Parfait. Qu'elle en revienne en un seul morceau.
Le parking extérieur était banal au point de le confondre avec celui d'un immeuble d'habitation d'un quartier moyen. Le permabéton gris clair couvrait la platefroem ovale, longue d'une dizaine d'emplacements adaptés à des speeders ou de petits transports de troupes, chaque coupelle mitoyenne étant soutenue par un bras d'acier trempé. Des bords en plastoïde à éclairage clignotant cloîtraient les imprudents à l'intérieur, garde-fou dangereux. On pouvait passer par-dessus la rondelle à vaisseaux en un faux pas de côté aussi vite qu'on pouvait expédier une balle de shockball. Des caisses entassées là, des câbles qui traînaient ici, une crasse naturelle dans les creux de la plate-forme. Ca respirait la tranquillité des temps de paix et l'usure conforme aux besoins du temps. Sur la troisième plate-forme trônait un speeder armé, avec appuyé sur son flanc une Devaronienne en blouson de cuir et en jean légèrement ample, un holster battant sa cuisse alors qu'elle s'approchait d'Yselia.
C'est vous, la Jedi qu'on nous envoie ?
Elle tend la main. Le ton n'est pas désagréable. Mais pas spécialement aimable non plus.
Inspecteur Daxon. Mais vous pouvez m'appeler Deskha. Si ça vous ennuie pas, j'aimerais qu'on parte tout de suite...
Les femelles de Devaron n'avaient rien de bien semblable aux mâles. Quand ceux-ci avaient une paire de corne dures montées sur une peau rouge luisante, les femelles portaient un petit duvet de poils blancs, comme une fourrure à mi-chemin entre les Bothans et les Calibop, et le manque de corne les faisait passer pour une toute espèce. Quand les hommes voulaient explorer et faire les brigands, les femmes restaient sur Devaron gérer les affaires courantes, et s'engageaient des des terrains de rigueur. Le droit, la justice, l'administration. Le duvet dépassait des manches serrées de sa veste en cuir, jetée sur une chemise aux derniers boutons ouverts, laissant paraître un morceau de décolleté blanc et sans tâche. Le Ranger salua la Jedi, qui fut invitée à entrer dans le speeder. Deskha ne perdit pas de temps et mit les voiles à toute vapeur. Elle grimpa en vitesse rapidement et s'inséra habilement dans le flux de circulation locale, doublant avec efficacité les usagers classiques. Une habituée des courses-poursuites, sûrement. Cela ne l'empêchait pas de faire le topo.
C'est un voisin qui a donné l'alerte. Une odeur insoutenable. Il a contacté son concierge, un droïde, pour qu'il intervienne. Le droïde n'ayant pas de détecteur olfactif, il a décidé d'entrer avec un passe-partout. Et... il a découvert un sacré carnage.
Elle laissa une main sur le volant, se pencha sur le côté, déplaça sa main libre vers la boîte à gants. Elle effleure la jambe d'Yselia au passage. Rien de grave. Elle ne retient pas son geste. Elle prend un paquet de cigarettes. Enclenche l'allume-cigare. EN prend une, la met en bouche. En tend une à la Jedi, par acquis de conscience.
Vous en voulez ? C'est un mélange de Terminus. Assez fort mais goulu.
Oui ? Non ? Ca fume une Jedi ? Ou alors c'est une vegan qui se la joue vie saine ?
Le type a été retrouvé... pendu, et complètement écorché. Le tueur a laissé... juste le tour de la bouche sur les muscles. Il a taillé les contours jusqu'aux oreilles. Un morceau de peau qui sourit... Il était pendu à un luminaire, en robe de chambre ouverte, nu en dessous, et la main autour du sexe.
Allume-cigare qui claque. Elle allume sa clope. Yselia en veut une ou pas alors ? Puis elle tire un coup, sans ouvrir la fenêtre - à cette vitesse, le bruit et l'appel d'air seraient trop violents - et fait un geste ample de la main qui ne tient pas le volant. Elle revient à la boîte à gants. Elle effleure encore Yselia. Genoux trop avancés ? On peut reculer les sièges dans ces véhicules. Peut-être qu'elle aime ça après tout. Être touchée aux jambes. Cette fois, Deskha tire une pochette bleue. Le dossier. Avec le nom de la victime, "Conte Ehcib". Un flimsi recto-verso sur la victime. äge, taille, poids, heure du décès estimée. Une liste de suspects. Compte-rendus d'interrogatoire. Il y en a un petit paquet. La pochette fait presque un kilo. Et le pire vient. Les photographies :
Un luminaire volumineux. On n'allume pas la lumière. Des rais filtrent par les trous dans les volets rabattus. Ca éclaire tout juste. Mais on n'allume pas la lumière. La tête est rouge. Un rouge bleui par une lampe destinée à appâter les mouches. On évite de les laisser tournoyer autour du cadavre. Quelques résistantes tournent autour des pieds. S'y posent, prennent quelques cellules de leurs trompes microscopiques. La tête... est rouge. Sauf un morceau de peau, bien beige. La bouche est tordue. La peau sous le nez est encore là, elle tient tout de sa seule attache aux muscles sous-cutanés. On prend en photo le cadavre sous tous les angles. Les choses qui pendent. Sa main écorchée, muscles à vifs, qui enserre un petit lambeau de sexe tout aussi rouge, comme une masturbation morbide, une mise en scène de l'acte onaniste pour les besoins d'une parodie macabre. Tous les angles y passent. Les objets tombés aux pieds.
Mais, à aucun moment, on n'allume la lumière.
En 16 ans de taf' j'ai jamais vu ça. Pourtant des tordus j'en ai coffré. Des crimes passionnels, des suicides maquillés en meurtres, mais plus souvent l'inverse, même des fois des frappes qui se la jouaient serial-killer. Mais là... on n'a aucun indice. Ca fait une semaine qu'on piétine, après deux mois d'enquête. On va d'abord sur le lieu du crime. On vous emmènera au poste plus tard.
Des questions ?
Ah, on arrive.
Elle se signale brièvement, puis elle esquive la file adroitement, filant entre les bâtiments comme un poisson se faufile entre les coraux en récifs. Encore trois minutes, et elle s'arrête au sol, dans un espace très restreint. Et très sombre. Le quartier n'est pas spécialement de mauvaise fréquentation. Mais il est sombre. La ruelle typique d'arrière-cour.
Les deux femmes sortent. Deskha écrase sa cigarette sur le permabéton de sa chaussure montante.
Suivez-moi. C'est au premier.
Elle ne prend pas l'ascenseur. Regarde à peine le droïde concierge à qui elle montre son badge distraitement, maugréant vite fait "elle est avec moi" à son attention. Une courte envolée d'escaliers. Quelques portes à dépasser. Et voilà. Un bandeau qui flotte, défile holographiquement de droite à gauche.
SCENE DE CRIME. LIEU RESERVE AUX EQUIPES DE POLICE. CONTAMINATION POSSIBLE.Contamination possible. Vous avez idée du nombre de couillons qui nous demandent si c'est contagieux ou s'ils doivent se faire vacciner ? Je vous jure, des fois... il faudrait vraiment un mot pour chaque truc.
Elle passe son badge devant un pilone qui fait les deux extrémités du bandeau. Il disparaît. Et avec, sa décharge en volt et son alarme hurlante. Les deux femmes pénètrent dans l'appartement. Il sent la sueur et le béton ramené du dehors. Des traces de pas sèches partout. On a piétiné ici. Au propre comme au figuré. Le reste semble propre, bien entretenu. Soigné du vivant de son propriétaire, maintenant laissé un peu vacant. Mais depuis sa mort, rien n'a eut le temps de vraiment s'encrasser. Des affaires un peu en pagaille, pagaille ordonnée, des vêtements sur une paterne, une armoire entrouverte sur des vide-poches en forme de paniers de faux osier, une moquette salie par les équipes scientifiques.
Au salon il n'y a plus rien. Cadavré dependu. Mais le reste est en place. Le temps qu'il faudra.
On a demandé un Jedi pour ce coup. Paraît que vous avez des dons extra-lucides. Observez, si vous voyez quoique ce soit, appelez-moi. Je serais devant l'entrée.
Devaronienne s'en va. Jedi s'en reste là. Jedi qui s'en peut aller observer...