L'Astre Tyran

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Les défaites de Yavin et Endor n'ont pas entamé la foi du gouvernement de Yaga Minor dans la doctrine impériale. La Nouvelle République suppose d'ailleurs que les quartiers de l'Ubiqtorat sont toujours dissimulés au fond des grottes et des forêts de cette planète qui abrite également de puissants chantiers navals.
Gouvernement : Empire
#34944
Helera écouta jusqu’à la fin de la tirade, et des ordres données par son patron. Modification puis alcool, pour fêter cette loi qui mettait fin à la liberté des sensitifs. Elle-même devrait alors se plier à ce teste, en signe de bonne foi. Son taux de midichlorien serait alors inscrit, et elle serait fichée comme étant différente. Si cela pouvait permettre à tous les autres sensitifs de la galaxie de ne pas rejoindre l’empire, c’était une bonne chose. Maintenant il fallait s’occuper des sensitifs de l’intérieur. On leur afficherait un numéro dont ils n’auraient aucune information pour le comprendre. Comme des bêtes dans un abattoir. Helera sentait le vent de l’extermination qui soufflait derrière ses oreilles, et avait l’impression d’en être l’instigatrice. Elle devait agir vite, et surtout, efficacement. L’homme de fer et ses pulsions meurtrières devraient être canalisés, tout autant que les hordes d’immondices qui tapissaient les rues, perdu dans leur idéologie faussée du genre vivant. L’égalité en tant que force, évaluant la personne pour ses compétences, et pour rien d’autre. C’était sa manière d’apporter à l’empire une pierre pour constituer l’édifice.

L’empereur lui-même souligna le fait qu’une femme était présente dans la loi impériale. Pour autant, ce compliment sonna faux, et il y avait ce petit quelque chose qu’elle ressentait chez lui. Un petit quelque chose qui incitait à faire confiance, juste avant que la lame du bourreau ne vous décapite. Toujours un second degré, toujours un regard qui remettait à la place. L’empereur avant l’homme, en toute situation. Ne jamais oublier ce fait là. L’empereur tuait, là où l’homme pardonnait. Quant aux annales, elle nota le fait, tout en se rendant que cette fois, c’était elle qui maîtrisait les annales. Elle imagina l’empereur attaché au niveau des jambes aux barreaux de sa chaise, là où une autre ficelle lui tendait les mains à l’autre extrémité. Helera étira un sourire. Les anales étaient ouvertes pour la reine.

« Ce sera avec plaisir. Je vous laisse à vos corrections, votre majesté impériale. »

Son sourire ne se tarit pas. Révérence, hochement de tête, il n’y avait pas de procédure pour dire au revoir. Quoi qu’il en soit, on retrouverait le soir même.




Et le soir même, la revoilà qui fut de nouveau conviée par l’empereur, dans son appartement. Etait-ce le même endroit où elle avait pu visiter les jardins ? Assurément pas. L’empereur avait de multiples résidences, de multiples royaumes, de multiples femmes et tout autant d’enfants. Une vie digne des gens indignes. Helera rentra dans son antre et de nouveau salua genoux à terre. Elle fut accompagnée par la remarque de l’empereur. Helera préférait les levés de l’étoile, dont le nom n’avait rien à voir avec Soleil, d’ailleurs. Lumière des Cieux, en basic. La reine n’en fit pas de remarque, on ne lui avait pas posé la question et n’allait pas parler pour ne rien dire. L’empereur lui présenta séant la loi Kor’rial. La reine remercia et dans un silence profond lu le texte de loi, beaucoup plus court que ce qu’elle avait pu transmettre.

« « Le comité spécial des affaires théologiques. » C’est donc le fameux comité qui fera état. Dans quel cadre agit-il ? Qui le composera ? Comment suis-je certaine que leur vision de la Force est la même que la mienne ? »

Cela se devait d’être posé. Pas envie que l’hérésie soit à jour dans l’empire. Tout était basé sur des faits et des connaissances. La seule à posséder de telles connaissances, c’était elle. Elle et quelques Nelvaaniens, cela allait de soi. La reine marchait tout en lisant la loi dans le détail, à défaut d’avoir eu un endroit où s’assoir.

« Il n’y a plus mention des Sith. L’usage pernicieux de la Force les englobera tous, oui. Quant aux affiliés ? La justice tranchera souvent. Attendons la première affaire qui fera jurisprudence. Je saurai être vigilante. »

Helera s’arrêta au niveau du balcon, là où les rayons de l’étoile dardaient une dernière fois de leur présence. L’empereur à ses côtés, elle laissa là le datapad et le regarda.

« Vous ne faites plus état de Nelvaan ni des droits inhérents au statut qui est nôtre. Dois-je comprendre que ces lois feront partie de la « constitution Nelvaanienne », si jamais il devait en avoir une ? »

Puis, la suite.

« Cela fait donc premier état de la Force dans l’empire. Ainsi, je vais devoir me faire identifier en signe d’acceptation à cette loi… »

La reine baissa un instant la tête puis la releva. Pas de sourire sur son visage, ni une mine emprunte de tristesse, c’était un fait qu’elle énonçait là.

« Pour la suite, j’aimerai permettre aux sensitifs identifiés d’entraîner leurs capacités, et donc d’ouvrir des écoles pour ces personnes. L’objectif est avant tout de protéger ces personnes, qui n’ont pas conscience de leur état, mais également leur entourage. Vous savez, les sentiments très forts qui nous accablent font souvent perdre le contrôle. Quelqu’un de non averti fera des choses qu’il ne pensait pas capable. Et donc deviendra coupable par le biais de cette loi. »

Une pause, coutumière.

« Avec votre permission, j’aimerai créer des centres d’aides pour ces personnes. Afin qu’elles s’intègrent au mieux dans la société. »
#34945
L'émoi sur la loi point ne lui échappa. « Je ne sais. Il n'est crée que depuis cet après-midi. La seul document officiel qui le préface est votre introduction, dans son texte sans altération. » Pas même orthographique. « Vous en avez la direction en tant que Conseillère. C'est votre son de cloche. Vous devrez respecter les procédures, autrement nommer qui vous souhaitez. » Tirant à lui une bouteille verte avec une étiquette aux motifs de vignes d'or, il fit tinter le verre de son ongle, d'une pichenette qui vibra l'atome cristallin, avant d'entreprendre l'ouverture du breuvage d'import lointain. « Tiens, pourriez-vous me passer les coupes posées là-bas ? » Helera, n'utilisant la Force que dans un contexte d'urgence, ne l'utilisait jamais à dessein de s'offrir du bref confort. « Pendant un instant, j'aurais pensé que vous célébreriez ceci en les faisant léviter jusqu'à moi... » Il avait cette curiosité, de celle qu'un spectateur avait pour les gens du cirque. On voulait voir le difforme, le bizarre, l'étrange, l'inexpliqué, l'exotique. L'anormal.

Mais elle devait bien se rendre compte de ce que la loi élaguait. Et pour cause. Etait-il question de laisser Nelvaan devenir un refuge ? « Non. Nelvaan ne sera jamais une planète sanctuaire pour les sensitifs. » S'il faisait verser le vin pétillant dans les réceptacles d'ivresse, il ne comptait pas l'offrir en brûleur de gorge avant qu'elle ne soit dans les dispositions pour le faire. « L'évocation de votre statut Patrimoine comme élément justifiant une appellation sanctuaire, d'une part, n'est pas pour porter l'avantage à mon esprit. Vous avez tenté d'ériger votre fief en saint des saints pour l'engeance sensitive. Si vous pensiez pouvoir peupler votre monde de tous ceux que vous mettez à part, vous pouvez abandonner cette illusion, maintenant et à jamais. Cela n'arrivera pas. » Il finit avec la coupe de son invitée, et commença de se servir. Le regard à la tâche de verser un liquide qui moussait vite. « Ceci pour des raisons limpides auxquelles je me dois de penser avant tout. Celle que Nelvaan est la planète impériale la plus éloignée du centre démographique principal. Imaginez-vous le voyage, long, incertain, périlleux et empli d'embuscades en puissance qui attend ceux qui voudraient migrer du Nord vers chez vous ? Ne savez-vous point que les Républicains, parfois menés par des pilotes Jedi ont pour habitude de détruire des navettes impériales, prétendant ne pas savoir qu'elles contenaient des civils, pour la simple action de causer du tort à nos peuples ? » Qu'on ne lui reproche pas de savoir mentir. La plus grande des sages n'en aurait rien perçu, Force comme alliée ou non. « Et posez-vous la question de la volonté de ces gens de se concentrer, loin de leur vie entamée, sur une planète gelée, où le peuple d'origine est composé d'hommes loups de technologie primitive, peuple devant absorber d'un coup un afflux migratoire qui leur demandera, par leur nombre et leurs origines, à modifier leurs coutumes d'ancêtres. Savez-vous comment les Nelvaaniens réagiront devant des millions d'habitants qui exigeront que leurs traditions séculaires disparaissent pour leur propre confort ? Ils réagiront par la violence. » Un message clair. « Et ils auront bien raison. Un peuple ne doit pas abandonner ses traditions, sa langue, sa culture, sa démographie au profit de quelques immigrés fortuits, même importés de force par une élite qui se tient éloignée de ces problèmes d'intégration. » Tout était catastrophique dans ce genre de schéma. Personne n'en terminait satisfait.

« Les sensitifs déclarés doivent rester sur place, vivre leur vie comme avant. Ne pas en parler. Oublier leur existence spéciale même. » Il fallait bien expliquer ce qu'il attendait d'Helera. « Ce que vous n'entendez pas, c'est que ces personnes sont intégrées à la société. Ils ont des capacités paranormales. Le but n'est pas de les aider à les développer et les comprendre. C'est de faire mourir ce don. Vous êtes ce que vous êtes. Vous pourrez inscrire votre taux de midichlorien sur votre carte d'identité si cela vous amuse. » Alors qu'il finissait de verser, il sentait ce besoin compulsif, comme il lui était coutumier, de la prendre de haut, lui mettre face à ses yeux un comportement d'enfant naïf, rêveur d'académies de Jedi en toges à agiter des sabres, à faire léviter des pierres et à prodiguer des conseils sur la vie, les petits oiseaux, la paix par la méditation et les fleurs aux gens qui ne demanderaient rien de plus que le chemin vers le marché couvert. « Vous voulez de ces gens qu'ils se sentent mal, exclus. Votre loi en est la preuve. Vous avez proposé ce texte. Vous me l'avez transmis. Vous avez approuvé mes suggestions. Vous avez insisté pour le chapitre capital concernant les Jedi. Ceci, vous l'avez voulu. Cette ségrégation, vous l'avez imposée. Et nul besoin pour moi d'enjoliver, j'ai la vérité avec moi. » Il tendit la coupe numéro Uno à Helera. Nul somnifère, nul poison, nulle substance quelconque. « Vous n'ouvrira pas de centre d'aide ni d'école car ils n'ont besoin ni d'aide ni de formation. Juste de vivre leur vie comme on l'entend au sens général. » Prenant à son tour sa coupe, il laissa à Helera le soin du toast. « Vous serez la dernière génération de sensitifs de cette Galaxie. Mon but n'est pas de les harmoniser. Mon but est de faire disparaître cette injustice. Personne ne devrait bénéficier d'un pouvoir aussi arbitraire. Vous n'offrirez aucun contrôle de ce privilège injuste à personne, en dehors de Nelvaan. Soit vous trinquez avec moi, et vous signez le pacte de disparition de la Force comme arme de la nature... Soit vous posez là cette coupe, et vous partez. »
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Un bon point déjà. Elle nommait qui elle voulait pour le comité. Autrement dit, c’était sa vision de la Force qui prévalait. La seule et unique vision de tout un empire qui reposait sur ses épaules. De quoi éviter à bien des malheureux de subir le châtiment de la corde. Ne restait alors qu’à créer la jurisprudence, tout en infiltrant la justice. Ou quoi que ce soit qui pourrait être un poids de taille quand il faudra sauver les gens. L’empereur tira bouteille et la fit récupérer des verres. Rien de plus normal, sauf sa remarque. Déplacée et sans aucun fondement, née de la curiosité infantile quant à cette magie dont il avait en horreur. Helera étira bref sourire.

« Si cela avait été le cas », répondit-elle. « J’aurai été la première à subir les conséquences de la même loi que nous célébrons. »

Autrement dit, le gibet. La Force n’était pas un jeu, ni même n’était créée pour amuser la galerie. Sus de ces comportements. Pas de Force. Puis vint la situation dans laquelle l’empereur présupposa, menti, et tenta de la tourner en ridicule sur un sujet dont il n’avait de connaissance qu’un outil, bien mal appelé. Outil qui permettait de détecter la Force dans un organisme. Est-ce que les Jedi tiraient sur des navettes ? Non. Un jedi n’attaquait pas. A qui pensait-il parler, à un soldat en peine de sang qui n’avait dans la caboche qu’un réceptacle à propagande ? Helera en fut offusquée. Des millions d’habitants supplémentaires ? Ils étaient actuellement cinq cents. Juste cinq cents sensitifs reconnus par les ordres. En comptant l’empire, on rajoutait une autre centaine de personne, rien de plus. On n’était loin des millions annoncés. Encore une fois, l’empereur perdait en crédibilité. Pour autant, cela n’amusa pas Helera qui voyait dans ses paroles, les dires d’un homme apeuré par ce qu’il ne comprenait pas. Mais qui était prêt à y voir des tours de magie.

Les coupes furent servies.

Il continua en élucubrations, pensant que les sensibles étaient intégrés. Ne se rendant pas compte qu’à chaque instant, ces gens entendaient les pensées des autres sans s’en rendre compte. Qui dans leur colère pouvait détruire un appartement. Dans leur tristesse écraser un speeder. Tout cela sans aucun contrôle. Ces gens qui devenaient des monstres, sans comprendre ce qui leur arrivait, sans se douter que leur potentiel était incontrôlable. Que tôt ou tard, ils seraient exclus du système, traqués, et finalement tués. C’était ce que la loi mettait en place. Une traque sans merci du sensitif. C’était ce qu’il voulait, et elle l’avait fait. Idiote et naïve reine du Sud qui pensait encore que la bonté existait dans le cœur de ce privilégié. Né avec une cuillère en or dans la bouche. Le privilège arbitraire et égalitaire était proscris, mais celui issu de la naissance était encore de mise. Ce n’était pas injuste, c’était illogique, inconcevable, pernicieux et totalement impérial. Mourir ce don. Il ne mourrait pas. A chaque naissance, de manière arbitraire, cela reviendrait. Encore et encore, sans qu’il ne put rien faire. L’empereur qui voulait contrôler n’avait de contrôle sur sa bande de demeurés qui étaient prêts à lui baiser les pieds. La Force n’avait pas de maître. La Force écraserait tout l’empire.

Dernière génération de sensitif la fit tiquer. On parlait encore de ses enfants indirectement. La reine fronça les sourcils. Ces enfants qui n’avaient plus rien à faire sur Yaga Minor désormais. L’égoïsme de leur mère serait leur perte. Ces enfants seraient la prochaine génération de sensitif, qu’il le consente ou non. La reine était loin, très loin de les laisser en dehors de la Force. Ils étaient les héritiers du trône et de ce fait, devaient parler à la Grande Mère.

« Il est vrai. La vérité est désormais vôtre. Très bien. Cette loi visera donc l’élimination des sensitifs. Parce que c’est ce qu’il va se passer. Je suis votre conseillère, mon rôle est de vous conseiller. Conseille a donc été donné. »

De toute manière, c’était peu ou prou ce qu’il cherchait. Il n’en serait que fort aise. C’était donc le premier point. Le visage fermé de la reine ne trahissait pas la rage qui s’était emparée d’elle. Un éclair zébra l’horizon et quelques secondes plus tard, éclata dans les cieux. En fait non, la dernière phrase n’était que partiellement vraie. Il allait se passer autre chose. On appelait cela rébellion. Les armées sensibles de la galaxie, se retournant contre celui qui aurait pu les utiliser. La Force appelait ses fidèles et savait reconnaître ses ennemis. La vérité était pour elle, l’histoire en plus.

« Je vous propose l’inverse. Signons ce traité, et trinquons après. Je suis prête à le faire. Je suis la seule à connaître le sujet aussi bien, alors je préfère être responsable de cette guerre. Car c'est bien de cela dont il est question. Etes-vous prêts, votre majesté impériale, à déclarer une guerre à la Force ? »

Helera n’attendait que l’affirmation pour signer. Mais que diable, faisons cela vite, car elle commençait à avoir soif. Le feu ardent de la rage avait besoin de l’ivresse pour s’éteindre.
#34952
L'Empereur roula des yeux. « Une loi ne se prend pas au pied de la lettre, ma chère... Auquel cas, l'Empire ne serait plus peuplé que d'engeôlés. » D'un point de vue strictement législatif, on prenait parfois quelques largesses avec ce que les textes évoquaient aussi brutalement. L'usage de la Force, interdit ? Soit, mettons, admettons. Si l'un ou l'autre faisait léviter un verre, tout au plus recevrait-il un "fais attention à qui tu montres ça". Rien de bien létal au long terme. Il fallait une sacrée dose de malchance pour tomber sur l'homme, ou la femme, qui allait dénoncer l'acte au Bureau, et qui n'allait même pas réclamer la Croix Impériale pour son acte citoyen exemplaire.

Mais c'était donc au tour d'Helera de mal comprendre. « Très bien. Cette loi visera donc l'élimination des sensitifs. Parce que c'est ce qu'il va se passer. » L'Empereur ne rajouta rien immédiatement. Les bulles fusaient à la surface, partant en lignes en douces courbes des bords. La poussière occasionnait le phénomène. Harlon semblait y plonger son regard. Comme captivé. A s'y concentrer, il y voyait... plus grandes choses. Les bulles se métamorphosèrent. Les bords de cristal de Chandrila devinrent des murs de plastacier gris et froid. Les motifs de vignes gravés dans le verre devinrent des engins de guerre sur quatre ou deux pattes. Les bulles, des colonnes de soldats en armure blanche, partis répandre la paix dans une galaxie totalement unifiée. Ce rêve, il le faisait sans cesse. Plongé dans une coupe de champagne, la plus triviale des bulles devenait une métaphore de sa fantasmée domination. Mais il devait revenir sur ce que venait de déclarer Helera. Eliminer les sensitifs. En guise de tout, il ne lui offrit aucune vraie réplique digne de quoi que ce soit.

Juste un grand sourire. Ce satané sourire. « Oh, que c'est mal me connaître... » Eloignée, des objectifs, de la réalité, des nécessités. Cette guerre était déjà déclarée. Pas comme elle pouvait le penser. Pas comme elle espérait le penser. Pas avec qui elle pouvait le penser. Nul besoin de trinquer à cela. Ou du moins, pouvaient-ils trinquer en toute confiance. Trinquons donc ! Cette guerre était déjà en cours. Les armes déjà prêtes. Déjà lancées, même. Elle était toujours là. Ses enfants arrivaient sains et saufs. Santé. Portons à nos lèvres ces gobelets de riches. On ne buvait du vin pétillant que par gourmandise, jamais par soif. Sans se départir de son abominable rictus, les yeux émeraudes à percer la chair de Kor'Rial, l'Empereur termina rapidement sa coupe. Il devinait parfaitement le comportement de la femme. Sa capacité de concentration, venue de ce don dont il était jaloux - avait-il besoin de jouer les magiciens du secret en le disant ? comment ne pas se dire jaloux de ce qui pouvait remodeler l'atome, les esprits, la vie peut-être - lui permettait de garder un calme absolu. En face de la tempête qui bouillait dans les iris de l'Empereur, qui, bien que simple mortel, n'en restait pas moins un des êtres directement et indirectement les plus dangereux de la Galaxie, elle pouvait fixer son flux sanguin, sa température corporelle et ses mouvements oculaires comme l'aurait fait un athlète les pieds posés sur le plot de départ. Cette arme des temps jadis, le regard fixe, sans clignement, dans l'oeil de son adversaire, avait sonné des augures et des arrêts de mort par centaines. Etait-ce la fin pour quiconque subissait le Jugement d'Astellan ? Cet oeil au vert rêveur, qui scrutait, s'imprégnait, se délectait du malheur imaginé ? Pouvait-elle sonder, même vaguement, le tourbillon des sentiments intimes et incalculables de l'Empereur ?

Personne ne connaissait ses objectifs. Ni même s'il était sincère avec lui-même à commencer. On le savait cyclothymique. On le savait colérique, capable de moultes cruautés innovantes. Volontiers meurtriers de sa personne propre. Mais on le savait planificateur. La politique l'avait bercée jusqu'à une place où le jeu se jouait sur une autre dimension. Ses leçons l'avaient glissé entre les mailles d'un système de complots ordinaires. Il était entré dans une cour de complots extraordinaires, de ceux qui se passaient de calomnies, de triche, de mensonges et d'alliances fantoches pour un contrôle de secteur. Mais cette culture profonde, sa connaissance aiguisée de l'Etat Profond et ses projets inconnus le rendaient d'autant plus imprévisible. Helera Kor'Rial ne pouvait rien savoir des projets de l'Empereur. Car des projets, en avait-il !Chaque région de la Galaxie avait son rôle à jouer. Une place dans son Grand Échiquier. Un plateau voilé dont même Elizabeth, son aimée, sa femme à venir, ne connaîtrait jamais rien. On ne lisait aucun détail dans le regard, et dans la brume émotive de l'Empereur. Mais dans ces yeux, ces deux diamants polis au laser, on lisait un plan. Un de ceux qui pouvait mettre à mal les acquis de chacun, dans tous ce qu'ils avaient jamais connu.

« Si vous avez fini, vous pouvez partir. » Il posa lui-même son verre. « Ou vous pouvez rester. Vous serez là, mais vous ne me verrez pas. Vous me croiserez peut-être. Mais votre esprit ne sera aucunement dans le même plan que le mien. » Il pencha la tête sur le côté. « Une fois sortie, vous réfléchirez à votre place. Vous viendrez à la conclusion que rien ne va. Vous regarderez les choses, vous regarderez les gens. Vous songerez à vos enfants en route vers ici. Rien ne sera plus triste et perdu que vous. Vous avez perdu vos objectifs. Vous ne savez plus qu'en faire. Vous avez une chance à côté de moi. » Sa posture le rendait toujours plus imposant. Le soleil couchant baignant son contour d'un halo doré, lui-même plongé dans le noir par la contraste. L'Empereur, à ce moment, par la bénédiction tacite du soleil indiscret, était devenu ce que beaucoup commençaient à voir de lui.

Un Prophète du Renouveau. Un prédicateur de la Gloire et de la Grandeur. « Trahissez-moi, Helera. C'est votre seule chance de m'empêcher de réaliser ce que vous pensez être votre destruction. » Il leva un doigt. Un seul. Qu'elle ne parle pas. « La nuit va tomber. Je dois travailler... je vous donne le bonsoir et votre congé de mes appartements. »
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