- lun. 4 nov. 2019 00:23
#36331
Depuis les entrailles de son vaisseau délabré, penché sur des flacons remplis de sangs mélangés, un Seigneur Sith à l'identité mutilée mettait en route de glorieux projets. Pendant longtemps, l'Egorgeur avait nourri des ambitions aussi grandioses que mortelles pour la galaxie. Pendant longtemps, il avait été trop distrait par sa santé dégradante pour les mener à termes. Mais la renaissance de son être dans un corps de métal lui avait enfin offert tout le loisir de les mettre à exécution... Ainsi qu'une nouvelle perspective sur leur finalité. S'emparant d'une mixture aux reflets ambrés, les doigts griffus et métalliques de l'alchimiste en déversèrent quelques gouttes sur une fiole contenant des tissus vivants. Avec une attention glacée, son faciès de métal imperturbable, Odion observa la masse organique se tordre et se contordre dans un sifflement de fumée noirâtre et nauséabonde. Sans mot dire il en récupéra les restes avant de les ranger dans l'étagère, déjà bien remplie d'échantillons putréfiés. Sa main glissa le long de l'étalage, songeuse. Quelle chose fragile que la chair pensait-il, fasciné par les mystères du vivant qu'il perçait jour après jour, apprenant avec assiduité comment le renforcer... et le détruire. Mais aucune des étapes de ce processus ne parvenait à l’émouvoir.
Il eut été aisé de penser que l'Exterminateur, comme il aimait autrefois se faire appeler, avait toujours été un monstre dépourvu de remords. Et il était tout à fait vrai que le cyborg n'avait été du genre à rechigner à la perspective d'un carnage. Mais même à son insu les chaînes de la conscience continuaient d'entraver sa progression. La perspective de vies gaspillées peinait son cœur battant, ralentissait son bras prêt à frapper. Mais le programme qui régissait désormais ses décisions le débarrassait du fardeau de la familiarité. Leurs supplices lui semblaient étrangères, lointaines et totalement dénuées d'intérêt. Les humains perdus sur l'autel de son travail n'étaient désormais plus que des chiffres, des données analysées froidement par un ordinateur qui se délectait d'avance des progrès à venir. Les millions d'âmes sacrifiées n'étaient même pas un coût digne d'être considéré dans ses calculs. L'astre tyran avait pris à Adrix une part essentielle de lui-même. Le vide ainsi laissé serait comblé au prix d'un lourd tribut pour la galaxie.
Une purge. Odion avait déjà déduit que seule une extermination de masse pourrait guider cet univers stagnant vers de nouveaux lendemains. La machine qu'il était maintenant n'en était que plus convaincue. Les catastrophes majeures forçaient les populations à s'adapter, à accepter une évolution naturelle que les progrès techniques freinaient. Les guerres généraient l'innovation, les maladies des anticorps, ainsi allait tout la logique du vivant. Non, plus encore, le cycle de destruction et de renaissance était la loi sur laquelle était fondé l'ordre même de cette réalité. Et la destruction était terriblement en retard. L'Empire avait fait de l'immobilisme le pilier de sa société viciée. L'astre tyran poursuivait un objectif stérile de complète extermination.
Darth Odion était le seul à comprendre pleinement les lois de l'entropie. Il n'agissait pas pour satisfaire une vulgaire soif de conquête ou un puéril désir de tuer. La galaxie ne comprendrait pas son œuvre, le Sith en avait conscience, mais les moutons n'avaient pas besoin de comprendre pour être guidés vers de meilleurs pâturages. L'Exterminateur n'avait nul besoin qu'on le suive pour agir.
Et les premiers pas de ce projet ambitieux le menaient vers un monde lointain, oublié des drames qui se jouaient sur Coruscant : Saleucami. Le vaisseau de l'Egorgeur s'était caché en orbite de la planète aride tandis que son maître descendait pour en arpenter les rues, au même instant qu'il travaillait pourtant à son alchimie dans le croiseur délabré. S'il y avait bien un atout à ce nouveau corps, c'était certainement le don d'ubiquité. Pourquoi se borner à être un seul endroit, lorsqu'une simple connexion réseau lui permettait de s'atteler à de multiples tâches à la fois. La petite course qu'il devait effectuer sur le sol de Saleucami ne nécessitait pas qu'il utilise son corps principal. Si l'on pouvait appeler ça ainsi.
C'était donc sous les traits d'un magnaguarde rafistolé avec le Mechu Deru que Darth Odion se rendait dans les bafonds. Cette planète survivait à son climat hostile par sa position commerciale importante. Mais sa position excentrée, malgré le joug officiel de l'Empire, en avait fait un terrain fertile pour l'épanouissement d'organisations criminelles. Adrix avait pris contact avec l'une d'entre elles pour obtenir une marchandise toute particulière. Un lot qui mettait bien trop de temps à arriver à son goût. Un agacement que son contact ne semblait pas avoir pleinement appréhendé à en croire la mine satisfaisaite qu'il affichait.
Assis face à face dans un bar miteux, le droïde fixait le contrebandier de ses yeux étincelants comme des rubis, enveloppé dans une cape noire qui servait davantage à cacher son état d'usure que son identité.
Son ton mielleux de commerçant sonnait aussi creux que ses excuses. Adrix n'était pas dupe. Les Hutts n'avaient jamais eu de problèmes à contourner les interdictions. Il fallait bien plus qu'un blocus pour empêcher une marchandise de circuler, en particulier une qui pouvait se reproduire hors de son monde d'origine. La seule raison pour laquelle le Sith n'avait pas reçu son dû, c'était parce d'autres clients étaient traités avec davantage d'égard. Après avoir pesé ses options un instant, le droïde posa sans cérémonie une boîte contenant un supplément de crédits dont la vue attisa dans le regard du criminel une flamme d'appétit.
Lorsqu'il tendit la main pour s'en emparer, Odion lui saisit le poignet, détendant son bras avec toute la vélocité d'un serpent. Sa poigne d'acier se referma comme un étau, manquant de lui briser l'articulation alors qu'il énonçait avec un calme glacé.
Son regard, pourtant de simples capteurs, brillait d’une cruauté implacable pour celui qui aurait la sotte idée de le décevoir à nouveau. Le contrebandier Twi’lek n’était pas un fervent croyant de ces histoires de Sith et de Jedi, mais ce qu’il sentait émaner du tas de ferraille en face de lui suffisait à ébranler son absence de convictions en la matière.
Soudain, un bruit sourd fit trembler le bâtiment. Une dizaine de mains se portèrent instinctivement à leurs armes avant de s’abstenir. Une explosion avait eu lieu en ville. Un attentat peut être, ou encore un accident. En tout cas rien qui concernait les individus rassemblés ici. Tous sauf Odion. Car il sentait quelque chose en provenance de la source. Un appel qui résonnait dans les profondeurs de son esprit. Quelque chose, ou quelqu’un, hurlait inconsciemment son désir de vivre. Et cette détermination résonnait avec fracas dans les courants de la Force. Ce qui ne pouvait signifier qu’une chose pour le Seigneur Sith. Il y avait là bas un potentiel qui n’attendait que d’être cueilli. Il en avait la conviction.
Dans le vaisseau, le droïde cessa un temps ses expériences pour tourner son regard vers la table d’opération encore souillée par le sang séché du maître Jedi qui l’avait jadis occupée. Voilà qui tombait bien. Il y avait justement une procédure qu’il désirait tester…
Le magnaguarde mit un terme abrupt à la conversation, se dirigeant d’un pas décidé vers celui dont l’esprit commençait lentement à s’éteindre.
Il eut été aisé de penser que l'Exterminateur, comme il aimait autrefois se faire appeler, avait toujours été un monstre dépourvu de remords. Et il était tout à fait vrai que le cyborg n'avait été du genre à rechigner à la perspective d'un carnage. Mais même à son insu les chaînes de la conscience continuaient d'entraver sa progression. La perspective de vies gaspillées peinait son cœur battant, ralentissait son bras prêt à frapper. Mais le programme qui régissait désormais ses décisions le débarrassait du fardeau de la familiarité. Leurs supplices lui semblaient étrangères, lointaines et totalement dénuées d'intérêt. Les humains perdus sur l'autel de son travail n'étaient désormais plus que des chiffres, des données analysées froidement par un ordinateur qui se délectait d'avance des progrès à venir. Les millions d'âmes sacrifiées n'étaient même pas un coût digne d'être considéré dans ses calculs. L'astre tyran avait pris à Adrix une part essentielle de lui-même. Le vide ainsi laissé serait comblé au prix d'un lourd tribut pour la galaxie.
Une purge. Odion avait déjà déduit que seule une extermination de masse pourrait guider cet univers stagnant vers de nouveaux lendemains. La machine qu'il était maintenant n'en était que plus convaincue. Les catastrophes majeures forçaient les populations à s'adapter, à accepter une évolution naturelle que les progrès techniques freinaient. Les guerres généraient l'innovation, les maladies des anticorps, ainsi allait tout la logique du vivant. Non, plus encore, le cycle de destruction et de renaissance était la loi sur laquelle était fondé l'ordre même de cette réalité. Et la destruction était terriblement en retard. L'Empire avait fait de l'immobilisme le pilier de sa société viciée. L'astre tyran poursuivait un objectif stérile de complète extermination.
Darth Odion était le seul à comprendre pleinement les lois de l'entropie. Il n'agissait pas pour satisfaire une vulgaire soif de conquête ou un puéril désir de tuer. La galaxie ne comprendrait pas son œuvre, le Sith en avait conscience, mais les moutons n'avaient pas besoin de comprendre pour être guidés vers de meilleurs pâturages. L'Exterminateur n'avait nul besoin qu'on le suive pour agir.
Et les premiers pas de ce projet ambitieux le menaient vers un monde lointain, oublié des drames qui se jouaient sur Coruscant : Saleucami. Le vaisseau de l'Egorgeur s'était caché en orbite de la planète aride tandis que son maître descendait pour en arpenter les rues, au même instant qu'il travaillait pourtant à son alchimie dans le croiseur délabré. S'il y avait bien un atout à ce nouveau corps, c'était certainement le don d'ubiquité. Pourquoi se borner à être un seul endroit, lorsqu'une simple connexion réseau lui permettait de s'atteler à de multiples tâches à la fois. La petite course qu'il devait effectuer sur le sol de Saleucami ne nécessitait pas qu'il utilise son corps principal. Si l'on pouvait appeler ça ainsi.
C'était donc sous les traits d'un magnaguarde rafistolé avec le Mechu Deru que Darth Odion se rendait dans les bafonds. Cette planète survivait à son climat hostile par sa position commerciale importante. Mais sa position excentrée, malgré le joug officiel de l'Empire, en avait fait un terrain fertile pour l'épanouissement d'organisations criminelles. Adrix avait pris contact avec l'une d'entre elles pour obtenir une marchandise toute particulière. Un lot qui mettait bien trop de temps à arriver à son goût. Un agacement que son contact ne semblait pas avoir pleinement appréhendé à en croire la mine satisfaisaite qu'il affichait.
Assis face à face dans un bar miteux, le droïde fixait le contrebandier de ses yeux étincelants comme des rubis, enveloppé dans une cape noire qui servait davantage à cacher son état d'usure que son identité.
- « - Il faut nous excusez, avec le blocus de l'Empire autour de Nam Chorios, ces friandises sont devenues plus difficiles à se procurer. Le patron vous demande encore un peu de patience. »
Son ton mielleux de commerçant sonnait aussi creux que ses excuses. Adrix n'était pas dupe. Les Hutts n'avaient jamais eu de problèmes à contourner les interdictions. Il fallait bien plus qu'un blocus pour empêcher une marchandise de circuler, en particulier une qui pouvait se reproduire hors de son monde d'origine. La seule raison pour laquelle le Sith n'avait pas reçu son dû, c'était parce d'autres clients étaient traités avec davantage d'égard. Après avoir pesé ses options un instant, le droïde posa sans cérémonie une boîte contenant un supplément de crédits dont la vue attisa dans le regard du criminel une flamme d'appétit.
Lorsqu'il tendit la main pour s'en emparer, Odion lui saisit le poignet, détendant son bras avec toute la vélocité d'un serpent. Sa poigne d'acier se referma comme un étau, manquant de lui briser l'articulation alors qu'il énonçait avec un calme glacé.
- « - Ceci est la dernière "patience" dont je vous ferais grâce. Tachez de vous en souvenir. J’attend la livraison à la date convenue, ou je vous viendrais la chercher moi-même. »
Son regard, pourtant de simples capteurs, brillait d’une cruauté implacable pour celui qui aurait la sotte idée de le décevoir à nouveau. Le contrebandier Twi’lek n’était pas un fervent croyant de ces histoires de Sith et de Jedi, mais ce qu’il sentait émaner du tas de ferraille en face de lui suffisait à ébranler son absence de convictions en la matière.
Soudain, un bruit sourd fit trembler le bâtiment. Une dizaine de mains se portèrent instinctivement à leurs armes avant de s’abstenir. Une explosion avait eu lieu en ville. Un attentat peut être, ou encore un accident. En tout cas rien qui concernait les individus rassemblés ici. Tous sauf Odion. Car il sentait quelque chose en provenance de la source. Un appel qui résonnait dans les profondeurs de son esprit. Quelque chose, ou quelqu’un, hurlait inconsciemment son désir de vivre. Et cette détermination résonnait avec fracas dans les courants de la Force. Ce qui ne pouvait signifier qu’une chose pour le Seigneur Sith. Il y avait là bas un potentiel qui n’attendait que d’être cueilli. Il en avait la conviction.
Dans le vaisseau, le droïde cessa un temps ses expériences pour tourner son regard vers la table d’opération encore souillée par le sang séché du maître Jedi qui l’avait jadis occupée. Voilà qui tombait bien. Il y avait justement une procédure qu’il désirait tester…
- « -Je vous recontacterai… »
Le magnaguarde mit un terme abrupt à la conversation, se dirigeant d’un pas décidé vers celui dont l’esprit commençait lentement à s’éteindre.