« J'aimerai vous tutoyer mais ... vous êtes vous, je ne peux vraiment pas, je suis désolé ... Tutoyez et appelez moi Althar, ou comme vous le souhaitez, mais vous restez encore la figure d'autorité, la hauteur, la sagesse, vous êtes son père ... Et je n'oserai jamais vous tutoyer, vraiment ... »
Le rouge aux joues, c'était la réponse la plus honnête qu'il pouvait donner à cet homme qui lui inspirait tant de sentiments. En le rejoignant à la fenêtre, il ne s'était pas attendu à voir quelqu'un d'aussi tourmenté et si profond. Il avait vécu tant de choses, et avait été témoin d'autant plus d'évènements, ce qui en faisait ressortir une forme presque sombre, morose. Mais surtout, c'était une forme de sagesse et de grandeur qu'Althar en voyait chez celui qui se prenait à faire le bilan d'une vie, le regard vers l'horizon. D'une certaine manière, il avait une classe naturelle qui appelait à beaucoup de sentiments chez Althar. Et c'était une raison de plus pour ne pas le tutoyer aussi simplement. Il était l'enfant à côté du grand monsieur, et cela se percevait malgré l'effort qu'il essayait de maintenir pour paraître tout à fait normal et en ordre comme le gendre idéal qu'on l'avait préparé à être.
« Si .. si vous me le permettez ... quoi que la vie vous ai réservé, et quoi qu'elle puisse encore garder en réserve pour vous, sachez que vous dégagez ... quelque chose de bien, je ne sais pas l'expliquer. Vos enfants réunis, vous même en forme et plein d'énergie, surtout visiblement en pleine quête spirituelle ... c'est .. quelque chose. Oui ce n'est pas une bonne manière de vous complimenter, mais ... voilà, enfin, peut-être que c'est parce que vous êtes lié à Helera, mais je crois que vous faites partie de ceux que l'on écoute, et à qui on fait confiance quoi qu'il arrive. Vous êtes ... un père, ça doit être ça, plein d'expérience et de souvenirs, et en passe de faire la paix avec lui-même ... mais là ce serait m'avancer un peu trop, pardonnez moi. »
Il baissa la tête, en sachant que ce qu'il disait pouvait être mal compris. Ils ne se connaissaient pas, c'était une certitude, et se faire entendre dire par Althar qu'on a réussi sa vie pouvait être à double tranchant. Un jugement, ou une moquerie, alors qu'au final le Prince ne faisait qu'exprimer la confiance naturelle qu'inspirait malgré tout la figure paternelle. Mâture, marqué par la vie, il a tout pour remplir ce personnage si singulier que l'on retrouve parfois, dans les vieux contes ... il est l'ancien qu'on écoute, le héros résolu à une vie calme après avoir trop souffert de ce qu'il a été, ou encore simplement le formateur. Une autorité qui ne s'est pas construite juste parce qu'on a une grosse voix et de gros muscles, mais plutôt parce qu'on sait en l'écoutant, et en le voyant, qu'il a vécu des choses, et qu'il connait bien plus qu'il n'en dira jamais. Le regard perçant du Kor'rial laissait entendre tant de choses, et paraissait bien différent de tous les faux-semblants et artifices qu'un Prince pouvait percevoir à la cour. Beaucoup se voulaient donneurs de leçon, mais guère nombreux étaient ceux dignes d'être écoutés. La vie ne décide pas de l'alignement des conditions, et parfois le plus sage disparaît sans n'avoir jamais vu personne. Mais lui, ce père à l'odeur si forte, était au milieu des siens, et pouvait être une pierre angulaire du monde idéal que se représentait le Prince en regardant Nelvan.
Après tout, c'était ça le problème actuel qu'avait le têtan. Sans le vouloir, sans s'en rendre compte, tout comme Helera était le centre de fantasmes en tout genre, Carn se trouvait entouré d'une aura lumineuse que tout semblait renforcer. De cette petite rebelle qui lui avait tenu tête il y a des mois elle s'était révélée être la femme la plus puissante d'un Royaume et de tout un Ordre qu'elle avait bâtie de ses deux mains humaines. Comment, dès lors, ne pas voir chez elle les plus grandes qualités ? Battante née, réunificatrice, bâtisseuse, guerrière, savante, femme au grand coeur, humaine ... Si peu de choses formulables et tant d'autres non-dites, elle était splendidement parfaite. Son géniteur ne pouvait donc qu'en être un homme grandiose, élevé par son rôle particulier dans leur couple. Le père. L'ordre supérieur, et la barrière de sécurité finale, à même de les éloigner l'un de l'autre. Autant espérer qu'il soit bon et miséricordieux dans ce cas, n'est-ce pas ? Sage et aux cheveux gris, aux marques du temps et aux mains caleuses. Oh oui depuis que son coeur avait fondu pour s'accrocher à celui d'Helera, le prétendant rêvait yeux et bouche ouverts.
Si en plus on lui fait très subtilement un cours sur la Force, comment peut-on lutter contre ces idées hein ? Il faisait tout pour flatter son gendre dans le sens du poil, et cela fonctionnait merveilleusement bien. Cela devait d'ailleurs se ressentir par l'attention toujours plus grande qu'il portait au kuati, n'hésitant plus à prendre appui à côté de la fenêtre et en délaisser totalement la vue pour regarder celui qui parlait. Qui aurait pu avoir pu lui parler de cela ? L'idée l'amusa, mais bien évidemment ce n'était pas quelque chose qu'il connaissait. Et de la manière dont il présenta cela, quelque part, il rajoutait un élément au puzzle Kor'rial qui était en train de s'assembler sur Nelvan. La Force était semble-t-il leur lien, et leur identité. Elle est l'élément central qui les caractérise, comme s'ils s'étaient bâtis autour de son existence. De ce qu'Helera avait raconté d'elle, cela correspondait bien au cheminement chaotique qu'elle avait eu. C'était bien le seul élément qui n'avait jamais inféré malgré tous les camps où elle était passé, et toutes les existences qu'elle avait croisé. La Force, pure et innocente, unique élément de cohésion de la Galaxie ? Cela ferait un bon bouquin, si c'était aussi simple. Fallait-il qu'il avoue connaître ce qui était arrivé à sa femme ? C'était un peu tôt, peut-être. Ses yeux se portèrent sur ses doigts et le mouvement fluide qu'il essayait d'avoir, décrochant un timide sourire chez un Althar aux sourcils relevés. Il avait beau essayer de se le représenter, et de ne pas se poser plus de questions que ce que lui présentait l'homme, mais ce n'était pas facile à comprendre. Et la conclusion, directement tournée vers lui, eut fini de laisser rêveur le jeune sensitif incompris qu'il était. Que pouvait-il répliquer à tout cela ? Il n'en savait rien, à vrai dire. Sûrement beaucoup de choses, mais quoi ? Comment parler de quelque chose qu'on ne peut pas matérialiser et dont on ne connaîtra jamais l'existence, parce qu'elle est impalpable et invisible ?
Non, plutôt que se résoudre à s'enfermer dans des réflexions trop compliquées il valait mieux se concentrer sur la joie que lui procurait ce moment. Lui serrer la main, pour lui montrer la reconnaissance qu'il avait pour lui à le prendre ainsi au sérieux et à accepter de parler aussi ouvertement. Cet homme était bon, et était en passe de l'initier (ou en tout cas c'est ce qu'il espérait secrètement dans son petit coeur) à la magie qui entourait les Kor'rial. C'était aussi fascinant qu'invraisemblable, il était juste venu demander une approbation, et il repartait avec des leçons qui valaient des milliards.
« Non non tout ça ne fait pas partie de l'éducation princière, pas encore en tout cas ... » Petit rire amusé. « Tout ça est tellement ... » Il n'y avait pas vraiment de mot pour tout ça. En tout cas, lui, était incapable d'en parler. « Mais comment savez-vous qu'elle est là ? Je veux dire, est-ce qu'un jour vous avez été comme quelqu'un de normal, comme moi, qui ne sent pas tout cela ? Ma peau n'est balayée que par la chaleur de cette pièce, au mieux, et mon esprit est plus habité par les sentiments qui m'ont fait venir ici plutôt que tout autre chose ... Est-ce que ... enfin, pardonnez mon ignorance, peut-être que ma question est stupide mais ... elle .. elle a une odeur ? Un goût ? Ou bien c'est un sentiment, une sensation ? C'est ... c'est tellement fou cette magie, cette chose, c'est ... pardonnez encore une fois mon indiscrétion, mais comment vous l'avez découvert, vous ?
Même Helera ne me parle pas vraiment de tout cela, peut-être qu'elle a peur que ça mette une trop grande distance entre nous, je sais pas, alors que pas du tout, je pourrais vous écouter des heures ... »
Etrangement, elle n'avait jamais vraiment parlé de tout cela explicitement avec Althar. Les leçons, les discussions, oui, mais aussi franchement ? Pas vraiment, ou alors il devait être occupé à la regarder parler, en soupirant amoureusement devant celle qu'il devait quitter. Mais bon. Quoi que ce beau-père avait à y répondre, la simple présentation lui avait offert des étoiles dans les yeux, et c'est ce qui suffisait. Ne manquait donc plus qu'à essayer de comprendre plus profondément ce qu'il disait, si le kuati acceptait d'en parler. Un Gris qui évoque tout cela sans honte mérite bien toute sa gratitude, ils ne doivent pas être si nombreux à être aussi ouverts avec les non-initiés. Mais il fut malgré tout tiré à la réalité par la très fine odeur qui commençait à poindre de leur côté. La cuisine, oui, c'est vrai. Après que Carn ait eu répondu, le Prince se risqua cependant à couper court à la discussion comme un enfant qu'une mère appelle.
« Pardonnez-moi, si cela ne vous dérange pas ... Peut-être pourrions-nous continuer notre discussion durant le repas, si vous le voulez bien ? J'ai promis à votre fille que je l'aiderai à préparer ... »
Althar s'inclina prestement en attendant la réponse, à l'image du protocole nécessaire pour saluer un homme de haut rang, avant de finalement rejoindre la cuisine avec une certaine satisfaction. Premier échange et première discussion avec son père : check et plutôt bien réussie, c'était à marquer d'une pierre blanche ! Plus qu'à faire aussi "bien" pour tout le restant de sa vie. Dur.
________________________________Ha ça oui il n'était pas tellement discret dans ses pensées. Mais comment ne pas l'être dans une telle situation ? Retrouver celle avec qui il veut faire sa vie, avoir une discussion sérieuse et intéressante avec le père de celle-ci, le tout pour désormais retourner à ses côtés à elle ? Oh que non il n'était pas discret ni même subtil sur ses sentiments à cet instant. La cuisine s'offrit à son regard de manière plus vivante. Cozy, rustique mais très intimiste, la silhouette qui l'occupait lui permit de comprendre un peu mieux ce qui avait manqué lors de la visite : la vie discrète d'une jeune femme. Cuisinait-elle tous les jours pour elle ? De la sorte ? Seule et perdue dans ses pensées et son travail ? Cela devait donner des raisons de se morfondre, oui. Il n'arrêtait pas de se dire ça, depuis qu'il était arrivé ici. Etait-ce pour légitimer l'invasion qu'il était en train de mener ? Le voulait-elle là, au moins ? Ses doutes arrivaient parfois à reprendre le dessus, mais il les chassa en s'approchant d'elle. En une seconde, en une présence, la situation redevenait aussi simple que douce. Son sourire qui se dessina sur son visage d'ange, le fumet d'un plat aussi beau que bon, et surtout leur capacité à retrouver cette complicité si appréciable. Il ne faut pas grand chose pour s'amuser, quand on est deux, et surtout gourmands qui plus est.
La dégustation qu'il s'offrit fut exquise, et la légère fierté qu'en éprouvait Helera était encore meilleure. Son sourire était la chose la plus belle qu'il pouvait voir ici, de toute façon. Alors un morceau pour soi, et un morceau pour elle, chacun a droit à sa part. Bon bien sûr, il n'avait que vaguement conscience de tout le processus qu'elle mettait en oeuvre dans ses doigts. Mais cela n'empêchait pas de les remercier à sa manière, non, tout joueur qu'il fut. Et baveux. Une main sur sa hanche à elle, alors elle le gardait prisonnier entre des poignets de son côté, il ne pouvait s'empêcher d'avoir des pensées impures en la voyant manger comme ça. Et si en plus elle même n'hésite plus à lancer des allusions, il n'y a guère plus que Carn qui serait capable des les interrompre dans leur folie.
« Il n'y a visiblement rien qu'elle ne savent pas faire ... elles méritent des petites attentions elles aussi ... »
Et c'est comme ça qu'on se retrouve à dévorer les charmants doigts d'une Reine cuisinière. La scène était cocasse, presque improbable, mais il mit tout l'effort qu'il put à dévorer ces petits doigts si agiles. C'était pas désagréable, en soi, la sentir réagir à chaque mouvement de langue ou à une morsure très légère réveillait d'autres envies plus ... gourmandes. Mais ce n'était pas le moment, pas encore, pour l'instant il n'y a que ces quelques doigts qui auront droit à cet honneur. De quoi lui donner un autre appétit, celui qui dépasse de très loin l'estomac et qui vous fait vibrer tout le corps. Est-ce que c'est méchant ? Non, pas tellement, en sachant qu'elle a osé lui infliger pendant qu'il discutait d'une chose très important avec son propre père, et parce que de toute façon si c'est pas lui qui le fait ce sera forcément elle. Est-ce que je mens ? Bien sûr que non. Donc, c'était bien normal de vouloir jouer de la sorte avec cette main, d'une manière suffisamment suggestive pour que même Althar ne voit pas venir la suite. Pris au piège de son propre jeu, elle tentait de reprendre l'ascendant malgré tout le terrain qu'il lui avait offert. Presque chatouilleux, sentir ces doigts explorer ses hanches manquait presque de le faire rire malgré tout. Mais coincé entre l'évier et cette femme au désir débordant, il aurait fallu de peu pour que l'atmosphère s'embrase.
Son corps contre le sien, son envie qui retrouve la sienne, son esprit que se perd au milieu de son désir, elle l'embaume de toute la folie qui est leur à cet instant. Ce parfum, cette douceur qu'elle met en oeuvre ne se frottant à lui, et pourquoi pas une main princière qui se prend à se balader sur le dossier de la Grise. Serait-ce si mal de se laisser faire, et de mettre fin à de longs mois d'attente maintenant ? Ce serait tellement bon, et tellement puissant, juste une fois, rapidement ... Non, bien sûr que non. Mais ... Ce mordillement, ces sensations qu'elle lui offre sans qu'il ne le veuille, c'est lui qui se retrouve frustré à la tenter autant. Elle l'avoue, elle met des mots sur toute l'électricité qui se noue entre eux et leurs frottements. Une envie, oui. Exploser. C'est le mot. Renverser tout ce qu'il y a sur la table et ne plus tenir compte de leur réalité. Juste se laisser aller à leur fougue commune pour se prouver qu'on est bel et bien ensemble, et surtout très amoureux.
[Tout bas.] « Tu m'as tellement manqué ... Juste une heure à tenir ... »
Le repas, la chaleur d'un plat qui mijote pas très loin de son dos, l'odeur salée qui se mélange au parfum boisé de son amante, et la culpabilité très forte d'avoir envie de cela alors qu'il est dans la pièce d'à côté. C'est une des premières leçons d'un Prince, parfois on n'a pas forcément ce que l'on désire ! Et la Force sait combien il la désire, à cet instant. Et puisqu'il est le seul à avoir gardé une infime pointe de raison, en passe de disparaitre sous les mordillements volontaires sur son oreille, il doit accomplir son devoir pour le bien de tous. La rappeler à elle, la faire revenir de l'autre monde pour qu'ils puissent au moins finir ce repas et se débarrasser de cet invité avant d'en venir au dessert si attendu. Et oui ma Reine, il faut parfois sacrifier son plaisir pour le bien commun. Et non, ce n'est pas en prenant vos aises sur ce corps que cela changera, allez allez jeune dame ! Même en l'éloignant dans un baiser ardent elle résistait, mais c'était vain, elle le savait. Une main princière se perdit sa joue pour essayer de l'apaiser, mais c'était peut-être contre-productif.
« Oui oui ... Tu auras peut-être droit à tout cela ... Vas donc ... »
Dans un dernier geste de tendresse il réajusta les cheveux de sa gourmande Grise et lui essaya son front rougi d'envie. Pfffiou ... Ils n'étaient pas passés loin de la catastrophe. Reportant son attention sur les plats qui continuaient de cuire, Althar pu se rendre compte combien lui aussi avait eut un coup de chaleur, et surtout voir les rougeurs infligées à ses hanches par les mains Kor'rial. Ainsi donc elle voulait jouer à ça ... Très bien. En attendant, il était temps que l'esprit retrouve un peu de quiétude et de calme face à la prochaine épreuve : manger en famille. Et puis bon, c'était bien plus facile maintenant que ses pensées n'étaient plus là pour l’enivrer, non ? C'est pas parce qu'ils sont tous les deux en manque de l'autre que c'est si intense ? Si seulement c'était vrai, si seulement ils n'étaient pas aussi gourmands ...
Et après un petit moment à essayer de faire semblant de savoir ce qu'on fait, à préparer un plat et à aider à finir de mettre la table, les trois adultes de la pièce finirent par s'installer pour commencer à manger.
La dégustation était, il faut le dire, très bonne. Si bonne qu'aucun n'osait parler pour briser le silence instauré par le repas si goutu qu'ils étaient en train d'honorer. Entre les Kor'rial qui se regardaient en chiens de faïence, et un Althar qui ne sait pas comment se tenir avec ce père presque en face de lui, l'ambiance aurait pu être ... plus lourde. Mais était-ce réellement ce qu'on voulait pour un premier repas ensemble ? Pas forcément. Ca aurait été dommage d'entacher la journée de la sorte. Non non non, on est là pour bien manger mais pas pour se fâcher. Que dire, dans ce cas ? A elle ou à lui ? Qui serait le plus à même de relancer la discussion s'il venait à être interpellé ? Le vieux sage semblait plus dans la réflexion, dans le temps pris et les sentiments enfouis, ou presque. Enfin, peut-être. Ou pas du tout. Hmpf. Quant à Helera, la présence de son père semblait quand même la rendre silencieuse, ou en tout cas plus mal à l'aise. Pourtant elle avait bien proposé le dîner, non ? Dans ce cas, enfin, si elle est naturelle, ils pourraient discuter, et créer un bon échange de tout ça. Althar servit donc un peu d'eau à chacun et se risqua à sa première tentative de discussion à propos d'Helera, tout en liant son père à l'ensemble. Un bon équilibre, une bonne tentative, le tout pour mettre en perspective leur relation. Tous les ingrédients étaient là pour que ce soit parfait. Quelle foirade. Holalalala, cette réaction et cette gêne, se faire engueuler devant Carn par une Helera qu'il n'avait jamais vu comme ça. S'il avait pu se faire tout petit il l'aurait fait, baissant le regard et la tête au milieu de ses épaules de peur de prendre un mauvais coup de la part de la Grise. Une excuse ? Encore pire, cette fois il était fait, menacé d'une fourchette et de sous-entendus dont il n'était plus très certain, tout honteux qu'il fut.
Le ton qu'elle employait avait de quoi inquiéter, et le regard qu'ils s'échangèrent, l'instant d'après, était plein d'éclairs aux couleurs de l'arc-en-ciel. Qu'est-ce qu'elle cherchait à faire ? Il sentait bien là qu'elle l'appelait aussi à répondre, à braver l'interdit et lui tenir tête devant son père à elle, mais était-ce vraiment une bonne idée ? Ha oui, son petit jeu s'éclaircissait au fil de ses pensées devenues un vrai appel au défi envers la jeune femme. Elle aurait peut-être mérité un coup de fourchette en retour, et un duel en bonne et due forme sur sa fameuse capacité à lui sauter dessus aussi facilement. Un coup bien placé, et hop, un décolleté d'arrangé. Elle aurait vite déchanté, la mignonne, avec un Prince bien plus en forme qu'auparavant. Il aurait du lui montrer les dents. Mais trop tard, trop tard et vraiment pas le bon moment, s'il en jugeait du regard de Carn. Oui voilà, il était là pour lui, et pas pour un autre. Autant ne pas se laisser déborder par cette jeune effrontée qui ne lui veut que du mal. Une question, alors, malgré toute la diversion et la nuisance qu'elle laissait chez lui, comme s'il n'arrivait pas à penser à autre chose qu'elle. Quelle sorcière à utiliser sa magie pour qu'elle ne quitte jamais ses pensées, quelle sorcière belle et désirable qui était une bénédiction à goûter dans chacune de ses idées. Mais cela le faisait choisir les mauvais mots, et se méprendre dans certains propos qui auraient du être plus sympathiques. Rhaaa. Pourquoi les femmes ont donc tant de pouvoir ?!
A sa première question, et surtout sa première réponse, il se trouva incapable de trouver quoi répondre. Il ne le connaissait pas encore, pour ne pas dire pas du tout, il était donc impossible de juger de ce qu'il paraissait bon qu'il soit. Ou même s'il mentait. Mais il lui faisait confiance, alors il se contenta d'un hochement de tête et d'un sourire. Pas un chaman mais pourtant qui agit comme tel. Curieux. Peut-être que leurs futures balades dans la neige et leurs séances de coupage de bois en commun finiraient de les rapprocher, leur offrant comme ça une nouvelle occasion de discuter de tout ça. Eux sous la neige, emmitouflés de peaux de bête, abattant une énorme vibro-hache sur une buche. La classe. Nouvelle question, alors ? Cette fois la réponse fit naître une curiosité sans bornes, que le seul fait de porter sa man à son sabre aura suffi à éveiller. S'arrêtant même de manger pour le regarder avec de grands yeux, son regard défilait entre le visage du Jedi et son arme, les sourcils haussés en attendant ce qu'il en dirait. Cet homme en était un de leçons, et cette fois peut-être encore ce serait l'occasion d'une nouvelle. Comme l'enfant qu'il était, formé sur Têta par un précepteur trop bavard pour son propre bien, ses yeux s'étaient illuminés de mille étoiles en le voyant faire. Un vague souvenir de mots sur des Jedi, sous le portrait d'Odan-Urr, sans le savoir. Carn le renvoyait à ces moments de rêveries les plus folles. Pour ce côté mystique, lui au moins en offrait pour son argent, contrairement à une Helera peu affable sur ces questions. Qu'allait-il dire ? La Grise percevait certainement l'excitation folle qui était en train d'envahir chaque partie de son corps, sans parler de l'admiration pour son père. Ce n'était plus Althar qu'elle avait à côté d'elle, mais un enfant de 10 ans. Un sabre, oui oui oui. Honneur, noblesse, oui ! Chevalerie ! Prince ! OUI ! Bien contre mal ! Mais oui, oui de oui de oui ! L'ascenseur émotionnel montait en flèche très dangereusement. Est-ce qu'il devait lui dire que lui aussi avait une épée, pour les duels d'honneurs qu'il menait ? Et qu'on l'avait éduqué pour faire de ce principe un point cardinal de sa manière de pensée ? Il chercha les mots, n'arrivant plus à cacher le sentiment de satisfaction qui éclairait son sourire.
Mais ce n'était pas aussi simple. La vie ne l'est jamais autant, comme une Reine qui veut satisfaire un besoin physique ne peut se le permettre en présence de son père, un Prince n'apprendra jamais les choses d'un temps révolu par un homme qui a tourné la page. Le rêve doit rester un rêve, il n'est qu'une aspiration, un but derrière lequel on court, pour changer son existence, sans jamais vraiment l'atteindre. C'est lui qui nous permet de juger des bons et mauvais choix de notre existence. Ses rêves à lui étaient faits d'amour, de liberté, et de chevalerie. Et le meilleur des choix dans cette direction fut certainement la femme qui était à ses côtés, et pour qui il était prêt aujourd'hui à devenir un adulte. Mais à l'inverse, combien de mauvaises voies avait-il fallu prendre pour en arriver là ? Combien de fois s'était-il perdu loin de l'honneur ou du bien commun ? Trop certainement, écartant Helera de sa route des mois durant jusqu'à toucher le fond. Pourtant tout cela n'entachait pas son rêve. En rien un voile ne s'était porté sur ses aspirations ni ses battements de coeur intenses en écoutant son beau-père évoquer son ancienne vie dont il ne connaissait rien. Pourquoi avait-il cru qu'il pouvait le former ? C'était idiot, il n'était même pas de la famille. Rhaa. Certainement paraissait-il faible, ou trop propre sur lui, un Prince d'apparat. Un bon à rien dont la présence dérange plus qu'elle ne rend service. Il avait formé Loran, et même d'autres gens intimes. Voilà. C'était sûr. C'était la preuve. Tu es naïf mon bon Althar, si naïf et innocent !
[Bas.] « Je .. je comprends, je ne voulais pas me montrer trop en ... »
Les yeux baissés, marmonnant les excuses de l'enfant à son précepteur, comme à une époque lointaine, il ne vit même pas le regard que lui portait le Gris. Et surtout, il ne vit pas qu'il n'en avait pas fini. Althar redressa la tête avec fougue, ouvrant en grand ses yeux et même sa bouche. Des apprentissages Jedi ? Comme les vrais ? Les anciens ? Les vrais de vrais ? Avec lui ? Quoi ? C'est une blague ? Dites le si c'est une blague ! Il aurait pu en trépigner sur la table, presque. Ses mains repoussèrent l'assiette pendant qu'il essayait de reprendre un peu d'air pour réaliser la proposition. De vraies montagnes russes émotionnelles, aussi folles que dangereuses. Etait-ce une manière de parler ou bien réel ? Il fallait qu'il reprenne ses esprits, qu'il redevienne sérieux un instant. Helera en rajouta une couche, détournant l'attention du Prince vers elle. Etait-ce un défi ou une volonté de le faire craindre le pire suite à la proposition ? Ce qu'elle disait paraissait tellement improbable, rajoutant une forme d'absurde comique à tout cela qu'il ne sut plus si c'était réellement une proposition ou juste un petit jeu entre eux pour se moquer du frileux têtan qui visitait Nelvan. Et voilà qu'elle insinuait ouvertement les choses maintenant, devant un Prince qui ne savait plus où se mettre. Mais son regard plein d'appétit de sa part lui tira quand même un sourire en coin, comme si la perspective de pouvoir se réconforter au fond d'un lit avec elle suffisait à effacer tout le reste. Hm. Quand même ! Un peu de tenu, non mais ... Ses yeux finirent par se reporter sur son assiette. Il n'osa pas répondre tout de suite, encore échaudé par l'espèce de feu d'artifice qui venait d'avoir lieu dans son crâne, entre proposition folle et idées indécentes. Une main retrouva un peu de nourriture, tandis que l'autre accueillit avec grand réconfort cette autre main. Et puis zut, elle méritait bien un baiser, quand même. Ses doigts prirent leurs places entre les siens, et ce fut là finalement le meilleur moyen de se calmer. Comme toujours.
« Hmm ... Tu .. tu as dit .. que même sans faire cuire ce sera bon ? Mais ... »
Son regardait se perdait sur la table au fil des mots. Les regarder revenait à se risquer pour juger de la réalité de la proposition ou non, et c'est bien cela qui lui faisait peur. L'envie d'y croire était très forte. Et finalement, il retrouva le visage de l'humain après une dernière hésitation, balayant la dernière gène offerte par les allusions d'Helera d'un serrage de main plus concret.
« C'est .. une vraie proposition ? »
Regard à Helera, puis à Carn.
Nouvel échange de regards.
« C'est que c'est si ... inatten ... surprenant ? »
Cette fois il les dévisagea presque. Comment fallait-il considérer une telle proposition ? Comme l'acceptation sincère, par son père, de sa présence ? Et sa volonté de passer du temps ensemble ? Comme une manière pour Helera de s'assurer qu'Althar s'insérait bien dans ce monde nelvan qui n'était pas le sien ? A moins qu'elle ne cherche à se débarrasser de lui, et que ce ne soit qu'un moyen de moyen de ne pas l'avoir dans les pattes à longueur de journée. Qui plus est, des leçons données par le vieil homme, quitte à casser un bras ou deux ne feraient pas de mal à un Prince qui s'est invité sur cette planète sans invitation. Quelque part, il n'était pas certain de mériter tant d'honneurs, ni même de les vivre avec autant de joie. Il en faisait certainement beaucoup trop, mais n'était-ce pas la magie de la phase de découverte ? Helera et son monde, son père, ces moments de famille et cette vie à la dure sur ce monde inhabitable. Tout ça représentait tellement d'inconnus, alors qu'il n'était là que depuis une demie-journée, qu'il fallait se raccrocher à n'importe quoi, au moindre espoir capable de le rassurer. En direction d'Helera, il tâta le terrain avec un peu de plus de sympathie, dans cet esprit joueur encore timide devant son père sans trop savoir où il en était.
« Tu veux vraiment que je me fasse aussi mal que ça rien que pour toi ? C'est pour m'avoir à ta merci c'est ça ... ? Pffff ... les Reines et leurs lubies ... »
Un petit rire vint conclure la phrase, montrant bien combien il n'était pas vraiment serein. Mais quitte à se faire pardonner de ces défis qu'il n'osait pas formuler ouvertement à la jeune femme, comme celui de savoir si elle en avait marre du trop plein d'énergie d'un homme qui ne demandait qu'à la dépenser avec elle, ou même si elle appréciait juste le fait qu'il se fasse mal pour qu'elle ait le dessus sur lui. Tant de choses non-formulées qui resteraient au milieu de ses pensées, désormais redirigées vers Carn.
« Est-ce que vous me permettez une question peut-être étrange ? Je ne crache pas sur l'honneur que cela représente pour moi, que vous ne pouvez pas imaginer, mais ... je ne suis ni votre fils, ni l'un de vos proches, Monsieur, je suis simplement ... »
Le temps de parler sa main avait fini par se redresser, pour montrer une dernière fois leurs dix doigts entrelacés les uns avec les autres. Un symbole, toujours et éternellement.
« ... celui qui entend se dédier à votre fille, qui n'est qu'un prétendant, pour l'instant, et que vous ne connaissez quasiment pas. Pourquoi .. pourquoi me proposer cela, dans ce cas ? Enfin, je crois que je m'en fais une montagne .. hahaha .. pardonnez-moi, je ne peux pas m'en empêcher ... mais quoi qu'il arrive je passerai toutes les épreuves qu'il faut pour être digne de vivre ici, et devenir un chasseur, un jour, et .. autre chose. » Regard qui se veut discret vers Helera, mais qui ne l'est pas forcément. Oui. Mariage ou capacité à être son égal, c'est ce que cache son esprit dans ses mots. « Quoi qu'il arrive, je ne suis pas en mesure de refuser, et je n'en ai pas la volonté, si votre proposition est réelle. Merci Monsieur. »
Cette fois, après la gêne et la timidité c'est un simple sourire, un de ceux qui marquent son vrai sentiment et la gratitude sincère à l'égard de cet homme qui finit par s'afficher sur son visage. Et comme s'il avait besoin d'en faire un peu plus, de se rassurer une ultime fois, Helera eut droit à un baiser sur l'épaule, sur cet habit qui la couvrait, pour se donner la preuve qu'il était certain de ce qu'il faisait, même devant lui. Par contre, avec toutes ces émotions, il n'en avait pas fini son assiette qui était devenue presque froide. C'est avec quelques bouchées énergiques qu'il vida celle-ci dans son intégralité, faisant honneur à ce qu'il venait de manger avec gourmandise - Oui c'est pas très élégant de se resservir soi-même, mais quand on a faim et que c'est bon on peut le faire non ? Tsss. - et qui lui remplissait désormais bien l'estomac. C'est qu'il avait presque oublié qu'il fallait être capable de se bouger ensuite. Mais c'était son problème, c'est pas un repas qui l'empêcherait de faire ça. C'est ça de faire des banquets et leurs dérives en Tapani. Tout ça amenait donc à une fin de repas, et un rassemblement de tous les couverts. Sa Grise prit les devants bien qu'il en ait eut l'intention, au moins cela, laissant Althar face à celui qu'il redoutait. Et sans vraiment qu'il ne s'y attende, une question bien forte fut posée histoire de le mettre moyennement en confiance. Raconter des choses, en prix pour ses cours. C'était totalement déséquilibré, mais on ne peut que dire difficilement non à un homme si bien armé. Et Helera qui appuie, forcément.
« Cela ne vaudra jamais votre sagesse, je le crains ... L'Empire du Centre, c'est une bien belle manière de l'appeler, même si ce n'est plus tellement le cas ... Non non, bref, mon père n'a plus trop le temps de siéger depuis qu'il est devenu Grand Vizir, avec le nouvel Empereur. Longue histoire que je ne suis pas censé connaître, je crois, et que j'éviterais donc de raconter, je m'en excuse. Mais autrement, oui, ma mère, la Reine, s'occupe du Royaume tandis que j'essaie de l'aider comme je peux. Mais avec mes bêtises de l'an passé ce ne fut pas tellement une réussite ... Mon père ne veut pas l'avouer, mais il garde un oeil sur tout ça quand même. Donc calme et pas calme ... Mais cela ne vous aidera pas tellement à avoir des informations utiles, je crois bien ... »
La suite fut un vague descriptif de ce qu'il se passe dans l'Empire, des réformes, des mouvements, de la paix, de choses et d'autres pas trop approfondies pour ne pas l'ennuyer non plus. Ce n'était pas si palpitant, le Noyau Profond, et encore moins l'Empire. Mais il avait demandé, alors il serait servi.
« Ne me dites pas que tout ceci est très honnête ... Laissez moi vous rendre service autrement, quitte à ce que ce soit hors de cette planète, ou tout ce que vous voudrez d'autre ... Je m'en voudrai de n'être pas assez ... reconnaissant avec vous, et c'est un euphémisme ... Me parler, m'accepter, ne pas en vouloir à votre fille, et même ... me proposer cela, c'est si ... généreux ! Votre ouverture d'esprit vous honore, Monsieur ... »
Il inclina la tête avec le sourire. Ses propos étaient bel et bien sincères. Tout ceci se déroulait bien mieux qu'il ne l'espérait, vraiment mieux. Mais, à sa manière, comme le Prince trop rationnel qui se devait de ne pas accepter sa fortune aussi prestement, une dernière question devint nécessaire. Tout cela ne peut décemment pas lui arriver aussi facilement. C'est impossible. Il réajuste un instant sa chemise, pour se motiver, et replongea son regard dans les diamants bleus du paternel. Au moins il ne pouvait pas douter qu'elle était bien sa fille, avec des yeux si semblables. Enfin bref.
« Mais dites-moi ... Excusez moi de revenir une nouvelle fois là-dessus ... Si je comprends bien ce que vous voulez m'enseigner, n'est-ce pas là une affaire qui est normalement réservée aux ... initiés ? Vous êtes quelqu'un qui a de la sagesse à revendre, à offrir, face à cette vie qui a du être votre ... mais pourquoi le faire avec moi ? Les Jedi se forment entre eux, ils s'apprennent entre eux parce qu'ils ont ... cette toile entre eux, comme vous avez dit ... N'est-ce pas dangereux d'en parler avec n'importe qui ? Surtout aux non préparés ? Hm. Je parle peut-être trop, excusez moi encore une fois, vous êtes tellement ... Hm bref. »
Bon, ce n'était pas comme ça qu'il l'avait envisagé dans sa tête, et encore une fois, à trop faire face à cette figure d'autorité il s'était perdu lui-même dans sa question, quitte même à chercher à la justifier et s'enrouler encore plus dans sa propre corde. Et voilà où on en arrive, une nouvelle fois. Ce ne serait pas évident de se retrouver seul avec lui, c'était une certitude. Mais non, ce serait pas forcément comme ça, il y aurait Helera non ? Non, comme maintenant, avec sa chaise vide et son absence ressentie. Que fait-elle ? Est-ce que c'est la présence de son père qui l'empêche de rester avec eux ? Et puis pourquoi c'est elle qui fait ça hein ? Althar est là aussi pour ces tâches-là. Il va falloir qu'elle prenne l'habitude de déléguer, et de se laisser aller. Oui. Et puis voilà, si elle n'est pas là, comment peut-il faire pour se concentrer avec toutes les pensées qu'il a pour elle ? Non non non, ça ne va pas. Lentement le Prince recula sa chaise de la table.
« Je vais voir ce qu'elle fait, et surtout chercher quelque chose pour .. marquer le coup, si cela vous va ? Et puis c'est son anniversaire à elle, à la Grande Reine ... je reviens vite, excusez moi. »
Désormais debout, ramassant les derniers éléments en trop sur cette table, il laissa un sourire en pourboire au vieil homme avant de le quitter. La cuisine n'était pas loin, mais sa démarcation était suffisamment marquée pour donner l'impression d'être ailleurs. L'avait-elle entendu ? Peut-être pas, pas plus que lui ne l'avait entendu. Il déposa son fardeau où il put, non loin d'elle, pour en gagner les dernières mètres rapidement. Elle avait quasiment finie de faire la vaisselle, à ce qu'il semblait. Comme un enfant qu'on venait de gronder, l'air triste était exagéré à souhait, le pas un peu lourd, et la manière de parler marquer par de fausses larmes que même la Force ne pouvait pas voir.
« Holalalala ... Helera ... La voix était faussement grave, surtout qu'elle pouvait très bien percevoir la bêtise qu'il avait en tête. Ton père me déteste ... il vient de me le dire ... il a pas apprécié que je l'appelle ... Beau-papa ... »
Il éclata de rire avant de glisser sa tête de nouveau entre son épaule et sa tête, cette fois ne se gênant pas le moins du monde pour se coller derrière elle. La position était naturelle entre eux, un peu trop même, comme une mauvaise habitude dont il n'arrivait pas à se défaire. Ses bras entourèrent le ventre plein de la jeune femme avec douceur alors que le Prince exaltait du bonheur de la retrouver, elle et toute sa vie soudaine.
« Vous vous parlez pas trop n'est-ce pas ? Je pensais que vous étiez comme ça, c'est dommage, je l'aime bien à ton père ... mais je comprends ... je ferai comme tu le souhaites mon amour ... »
Si sérieux, et pourtant si taquin dans son comportement. Il était prêt à tout pour elle, quitte à se dédoubler pour paraître avec l'un, et vivre avec l'autre. Comme si cela ne suffisait pas, de la retenir de la sorte, il fallait en plus qu'il s'immisce un peu plus vers elle en posant ses lèvres sur sa nuque. N'était-il donc jamais repu ? Oh que non, quelques baisers sur cette zone érogène annonçaient la couleur. Et ne valait-il mieux même pas évoquer ses pensées plus explicites les unes que les autres. Mais quelque chose au milieu de celles-ci différait du simple désir humain, une subtilité s'était glissé au milieu de tout ça.
« Et tu n'as pas besoin de faire tout cela, je m'en occuperai dès que le repas sera fini ... Je suis là maintenant, profites-en pour souffler et goûter à la vie à deux, et à l'exploitation de ton ... que suis-je ? Ton amant ? Ton petit copain ? Ton Althar, peut-être ? Hm, on va se contenter de ça, laisses ces tâches à ton Althar, et ne t'embêtes plus avec tout ça, laisses faire ton petit Prince .. »
Tout en parlant, quelques baisers s'étaient glissés une nouvelle fois près de son cou, au milieu de cheveux rebelles qu'il essayait en vain d'apprivoiser sans les mains. Mais mieux encore, avec toute la douceur qui était sienne, ses mains descendirent le long des bras de la Grise pour glisser ses propres mains dans les siennes. Alors que lors de la dégustation c'était l'inverse, comme une seconde autorité qui voulait s'imposer, cette fois il désirait s'y substituer. S'ajoute à cela le fait qu'il ait insisté sur les deux derniers mots de sa phrase, et cela donne un cocktail surprenant, et surtout dangereux. Le menton posé sur son épaule, sa joue contre la sienne, ils pouvaient observer tous les deux ce qu'elle avait devant elle. De la vaisselle finie, peut-être restait-il un verre ou quelque chose d'autre. Ce n'était pas intéressant, non, ce qui l'était bien plus, au delà des mains pleines de mousse, était une fourchette nettoyée il y a peu et en train de sécher à côté de l'évier.
« Oh mais ... tu as nettoyé des fourchettes ... »
La main princière s'en saisit pour la montrer bien devant eux. Comprenait-elle où il voulait en venir ?
« Attends, ça me rappelle quelque chose .. Tu m'as dit quoi ? Même avec une fourchette je peux te battre ? »
Son corps se colla plus clairement contre le sien. Même s'il ne l'empêchait en rien de bouger ou même de se défendre, c'était l'intention qui comptait à cet instant. Fier de lui, il ruminait sa vengeance depuis l'instant où elle avait osé le défier avec une telle force.
« Es-tu si sûre de toi, chère Reine ? »
A partir de cet instant, quoi qu'elle fasse, il se déroberait à ses gestes à elle. Pas même un baiser, une caresse ou une quelconque attention ne pourrait être acceptée chez lui qui était habité par cette envie de lui montrer qu'il ne se laisserait pas faire. Elle voulait jouer ? Alors il jouerait ... maintenant ou après ? Remettre du bois dans les braises ? Ou bien carrément goûter à ce met qui l'attendait depuis trop longtemps ? Il ne le savait pas plus qu'elle, et c'est certainement ce qui les rendait fous à tous les deux.
« Et dire que tu me parles de me réchauffer, si je venais à avoir froid ... mais te souviens-tu de comment on fait, déjà, sans ta magie ? »
Peut-être qu'un petit peu de danse entre leurs bassins pouvait le lui rappeler, tout comme sa bouche qui effleure sa joue, sans jamais s'y arrêter.
« A moins que tu aies oublié ce qu'un Petit Prince peut faire à une Grande Reine ? Il ne lui en faut pas beaucoup non plus pour la faire trembler et activer ses petits doigts de pieds fous ... »
Ses lèvres s'arrêtèrent une nouvelle fois sur son cou. Mais plutôt que de choisir un point proche de l'oreille, il était allé plus bas, plus vers ce buste qu'il ne pourrait pas atteindre mais que quelques baisers pouvaient faire trembler, malgré la distance avec l'épicentre. Fallait-il lui rappeler combien ils s'étaient exercés pour apprendre à connaître le corps de l'autre ? Trop de fois pour des gens normaux.
« Pour battre une Grande Reine ... Une déesse de chair et de beauté, il suffirait ... d'un doigt ... »
Et hop, une fourchette qui dégringole dans l'évier sale, sans honte. Un défi, un vrai, à l'autorité de la jeune femme.
Tu souhaitais faire ton truc dans ton coin ? Oh non, tout ça c'est fini. Je suis là, et je suis bien déterminé à te le rappeler. Elle aimait jouer, et ça tombe bien, lui aussi. Ok, pas devant son père, mais quand même. C'est mieux que rien non ? Lentement, d'un doigt trempé d'un peu de mousse ou d'eau selon ce qui est utilisé par la jeune femme dans ce monde si rustique, il vint lui toucher le bout du nez, comme s'il souhaitait marquer celui-ci de son doigt vengeur. Puis, continuant son chemin, il glissa tout autant que son décolleté le permit, poussant le bouchon sans honte. Des yeux gourmands ne se génèrent d'ailleurs pas pour regarder ce qui s'offrait à lui. Après tout, il avait là un premier explorateur qui dégageait le terrain. Et lorsque finalement le tissu apporta la dernière résistance, il fit un bond pour venir perdre cet index bien plus bas ... Non pas là où elle l'aurait attendu, mais plutôt sous son habit, au creux de ce nombril qu'il triturait sans gêne.
Jusqu'à maintenant elle pouvait sentir son souffle chaud sur son épaule, et sur sa nuque. Mais tandis qu'il se taisait lui et son ton malicieux une nouvelle sensation plus ... humide se fit sentir sur cette zone sensible. Tout doucement c'est avec sa langue qu'il traça un chemin passant de son cou à sa joue, pour trouver une oreille toute mignonne cachée derrière des cheveux. C'était sale comme manière de faire, mais il fallait qu'elle comprenne combien il était sérieux dans sa tentative de la déstabiliser. Le lieu devint la nouvelle cave de ce monstre baveux qui s'amusait à en marquer tout le territoire par sa présence, quitte à offrir plus de rire et de dégout que de véritable excitation. Deux grands enfants qui s'affrontaient, voilà ce qu'ils étaient, de toute façon. Il ne lui infligea pas cette torture bien longtemps, préférant user de cette proximité pour y sussurrer quelque mots.
« La langue d'un petit Prince suffit parfois à faire vaciller de si Grandes Reines .. La Grande Mère elle-même redoute ce sort ... Alors que eux ... »
Il baissa de nouveau la tête, pour qu'elle comprenne bien de qui il parlait. Oh oui, ces deux là, ces deux monts de chair qui était source de bien des envies, ces deux monts dont l'image semblait gravée dans l'esprit d'Althar et qui étaient l'origine, à cet instant, de pensées propres à lui souhaiter de se réaliser. Oh oui, il fallait une dose très forte d'envie pour jouer de la sorte avec celle qui partagerait sa vie, mais c'était bien à cause de l'amour qu'il était fou d'elle.
« ... eux ils savent ce qui les attend ... et ils en frémissent d'envie ... regardes les ... »
Vue la position, sa bouche était à quelques centimètres de son épaule. Il suffisait donc de tendre les lèvres pour y apposer quelques baisers de plus, de lui apporter un peu plus encore cette soif d'attentions particulières, de la faire frémir un peu plus en sachant ce qu'il adviendrait quand il n'y aurait plus personne pour les gêner. Mais cette fois, sa bouche resta à la jonction de sa nuque et de son épaule alors qu'il entendait finir son petit manège. Elle le savait, le jeu était vicié dès le départ de toute manière.
« Mais pour l'instant, je tiens simplement ma promesse, où que tu sois, je te libèrerai ma si splendide Reine ... D'un doigt, pour l'heure ... N'oublies jamais qui tu défies, petite Reine ... »
Il bougeait, une main disparue, que faisait-il ? Deux choses très simples. Une marque, sur cette proie qui était sienne et qui avait osé s'en prendre à lui, par ses dents sur cette peau blanche. Des crocs à peine appuyés, plus pour y laisser une trace temporaire que lui faire mal, loin de l'optique charnelle et plaisante qu'il espérait lui offrir. Et en même temps, sa main libre, celle qui n'est pas sur son ventre, qui se glisse au creux des reins, dans son dos, jusqu'à y remonter pour atteindre la gêne de tissu qui s'y trouve. Un doigt, a-t-il dit, pour la libérer. Un doigt qui dégrafe le vilain morceau de tissu qui les retenait prisonniers. Il était si prévenant envers eux, si gentil et plein d'attentions que cela en était presque touchants ... ou bien pas du tout. Si gentil, vraiment ? Ceci fait, il se redressa, l'air satisfait, et lâcha tout ce qu'il tenait ou faisait. Il se reculerait même si elle venait à en demander plus. Pire que cela, il lui prit la main et se tourna vers la salle à manger, pour lui rappeler qu'il y avait un invité. Et oui, tout se paye. Supportes donc ce soutien-gorge qui se défait sans pouvoir l'enlever, car tout ceci m'est réservé. Il riait au fond de lui, oh oui, il riait comme l'adolescent vigoureux qu'il était. C'était vilain sans l'être, un jeu sans danger mais diablement excitant.
« Ton père nous attend, je lui ai promis un verre. Tu as de l'alcool quelque part ? »
Pas le choix, gente Reine. Nous sommes attendus. Ne le vois-tu pas à mon sourire en coin ? Oserais-tu afficher ma morsure sur ta peau aux yeux de ton père, exposant tous les vices qui nous habitent ? Ou même seras-tu capable de t'asseoir sur moi, pour ce dernier acte ? Oh belle Reine, que je t'aime.